j'avais indiqué dans l'avant-dernier article (piton dé nez) que mes stoppeurs arrivaient du dolomieu sans avoir été inquiétés, ils n'étaient pas les seuls ! Evidemment Héphaïstos a choisi de s'ébrouer et de s'éclaircir la voix au moment où je fais un tour en métropole fffffffffffffff
Prêts à tout pour voir l’éruption
Certains dimanches, le sommet du volcan est aussi fréquenté que le Barachois, ou presque... Hier matin dès l’aube, deux groupes sont déjà penchés sur le cratère Dolomieu. Des visiteurs locaux mais, aussi, les clients d’un voyagiste métropolitain spécialiste, entre autres, des voyages volcaniques. Arrivés dès 3 h 30 du matin sur site, ces derniers prennent rapidement le chemin du retour vers le gîte, au cas où... Tout au long de la matinée, des dizaines de marcheurs vont se lancer à l’ascension du cratère Bory, comme si de rien n’était, tandis que d’autres redescendent déjà. Personne ne semble y voir grand mal. L’accès au sommet du piton de la Fournaise est pourtant interdit depuis l’éruption d’avril 2007 et l’effondrement massif du cratère Dolomieu. Une interdiction pieusement rappelée dans les communiqués préfectoraux, solidement affichée à l’entrée de l’enclos du volcan et au “checkpoint” de la chapelle de Rosemont où les randonneurs devraient normalement faire demi-tour ou obliquer sur un autre itinéraire - autorisé - dans le fond de l’enclos.
Pourquoi se gêner ?
Dans la mesure où aucun contrôle réel ne semble être opéré, pourquoi se gêner ? Touristes venus d’Europe et d’ailleurs, marcheurs des quatre coins de l’île se sont passés le mot et n’obtempèrent pas. En cas de pépin, l’administration aura beau jeu d’opposer la forêt de panneaux plantée au départ des sentiers interdits et la cinquantaine de mètres de chaîne rouge et blanche - brisée depuis quelques jours d’ailleurs - censée matérialiser l’interdiction de passage. “Le préfet est cool”, ose le leader d’un autre groupe rencontré au sommet hier matin, pas fâché de voir que l’enclos reste ouvert depuis la deuxième phase éruptive du 27 novembre. Quant à la réouverture au public d’un sentier permettant d’accéder à nouveau au sommet dans des conditions de sécurité acceptable et à l’aménagement de plates-formes d’observation, elle semble au point mort. Un an d’attente après l’éruption d’avril 2007, pas moins, une première reconnaissance a eu lieu en avril 2008, à l’issue de laquelle un accord de principe a été donné par l’administration. Las ! au fil des atermoiements, des soubresauts du piton de la Fournaise, du poids des réticences surtout, il a fallu de nouvelles reconnaissances. La dernière en date, en octobre dernier, n’a guère fait progresser le dossier. Si le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a conclu à l’absence de l’apparition de nouveaux risques que supposait l’ONF, la reconnaissance a malheureusement été menée par un tel mauvais temps - pourtant annoncé - que le rapport conclut piteusement à la nécessité de nouvelles observations ! Et à l’aube de l’année 2009, rien de nouveau à notre connaissance.
A force d’immobilisme…
Pendant ce temps, tandis que tout le monde s’en lave les mains, n’importe qui peut monter dans n’importe quelles conditions au sommet du volcan. Les portions entières du balisage volontairement masquées à la peinture noire - pour dissuader les clandestins ou parce que trop proches des bords du cratère - pourraient mener ces derniers à leur perte en cas de brouillard ou la nuit. Une famille de quatre personnes dont deux enfants en a fait les frais récemment, retrouvée en pleine nuit par l’hélicoptère de la gendarmerie, très loin du pas de Bellecombe. Surtout, ces visiteurs se risquent dans certaines zones réellement dangereuses du pourtour du sommet du volcan, où des effondrements de grande ampleur sont possibles, alors que les aménagements prévus sont précisément destinés à leur éviter ces secteurs et à offrir des itinéraires où le risque - impossible à éliminer totalement sur un sentier de montagne - reste d’un niveau acceptable. Evidemment, en cas de pépin, ce sera de leur faute, la réponse est connue d’avance. Pas faux, puisque interdiction il y a, mais que voulez-vous, à force d’immobilisme, le cratère déborde, font-ils comprendre Texte et photos : François Martel-Asselin
L’activité redouble d’intensité
“Jusqu’où cela va aller ?”
Notre volcan n’a pas tardé à leur donner raison. En négociant l’ascension du Bory dans la lumière toujours exceptionnelle des fins d’après-midi, nous croisons les derniers randonneurs qui ont bravé l’interdiction d’accès au sommet. Ils ont des étoiles pleins les yeux après la magie du spectacle qui s’est offert à leurs yeux, preuve qu’il y a urgence à trouver une solution pour que les éruptions du piton de la Fournaise soient enfin rendues à leur public qui piaffe d’impatience. Depuis le plancher du Bory, dans les dernières lueurs du jour, l’activité semble stationnaire. Des coulées s’échappent du cône le plus imposant par une brèche et dévalent la pente en d’étroites coulées. De temps en temps, des projections s’envolent vers le ciel. Sur sa droite, un cône plus petit laisse parfois échapper de courtes éructations. Un lac de lave occupe tout l’intérieur du cône le plus imposant. De grosses bulles viennent crever en surface. Les projections tissent un rideau de feu sur la toile de fond du rempart. Sur la gauche, le petit cône fait office de chalumeau.
La nuit tombe. Le ciel se piquette d’étoiles. Le piton de la Fournaise donne alors le meilleur de lui-même. Le lac de lave se déverse à gros bouillons sur les flancs. Les remparts s’en trouvent tout illuminés. Du petit cône s’échappe une flamme bleutée. Vers 2h du matin, dimanche, changement de décor. Le lac de lave est presque totalement emprisonné à l’intérieur du cône. Les coulées ne sont plus visibles que sur la gauche. Les projections tapissent d’étincelles les flancs du cratère qui dans la nuit a pris une dimension imposante accrochée à la paroi. Au lever du jour, statu quo. Vers 8h, la situation évolue. Les débordements reprennent puis petit à petit le cratère semble se refermer. Insolite, un nuage lenticulaire issu du cône éruptif s’évade du cratère.
Dans l’après-midi, l’observatoire enregistre un regain du trémor, qui atteint désormais près de cinq fois sa valeur du début de l’éruption. Aucun doute, le piton de la Fournaise renoue avec sa forme des meilleurs jours. Thomas Staudacher met en ligne le deuxième bulletin de la journée et commente : “Ceci confirme l’augmentation du trémor et du débit de l’éruption à long terme. Jusqu’où la courbe du trémor va-t-elle aller ?”
Alain Dupuis