Mon amie Rosario aime les roses et m'envoie un poème que tous les enfants d'Amérique Latine apprennent. Il est de José Marti, un "américaniste", poète et philosophe, qui a organisé la guerre d'indépendance de Cuba.
Cultivo una rosa blanca
Cultivo una rosa blanca
En julio como en enero
Para el amigo sincero
Que me da su mano franca
Y para el cruel que me arranca
El corazón con que vivo
Cardo ni ortiga cultivo
cultivo una rosa blanca
A propos de ce qu'écrit Harold Bloom sur JMG Le Clézio et que relaie Pierre Assouline le 21 avril dans son blog (après avoir affirmé il y a quelques semaines que Le Clézio n'est pas un écrivain voyageur !), elle me donne des infos très intéressantes :
http://passouline.blog.lemonde.fr/
Le Clézio au Mexique a fait naître un affrontement de deux champs : celui des écrivains qui se trouvent dans des institutions solides (notamment Jean Meyer, d'origine française, ami de LC dans le Colegio de Mexico, la plus haute institution dans son genre et qui a offert une place à LC pendant plusieurs années ; Meyer est du groupe qui formait aussi Octavio Paz et ses amis) contre celui qui se considère de gauche où se trouvent, à part quelques bonnes plumes, une cour de contestataires peu sérieux prêts à tout pour discréditer ce qui vient du groupe adverse. Les arguments faciles, les adjectifs non justifiés, et d'autres choses finissent par tout rejeter au nom d'un nationalisme offensé du plus bas niveau. C'est dommage que nos écrivains et intellectuels qui se placent eux-mêmes à gauche se permettent un manque de rigueur et de qualité qu'ils veulent justifier avec une idéologie. C'est vrai aussi qu'une partie de ceux de "droite" viennent des familles en meilleure situation socio-économique et cela, au Mexique, leur donne des opportunités de formation infiniment meilleures. Injustices du tiers monde? Oui.
Enfin, dommage, très dommage pour Le Clézio. Je crois que les intentions de LC ont été extrêmement généreuses envers notre pays, son regard plein de compassion pour ses souffrances et d'admiration pour ses trésors humains. Je pense aussi que l'intensité des écrits dits mexicains de LC est sans égale dans toute son oeuvre. Rien que d'avoir consacré douze ans entiers de sa vie à sa connaissance approfondie où il a vécu dans des conditions pas chics du tout (alors que la plus haute bourgoisie l'aurait accueilli les bras ouverts) comporte du mérite et pourrait provoquer, au delà de la critique positive ou négative de son oeuvre, un geste de gratitude. C'est triste que les passions d'intellos déclenchent ce tourbillon de bêtise.
Dans un dernier roman avec un thème et une géographie mexicains, LC fait le portrait des intellectuels mexicains comme des individus pleins d'arrogance, obsédés par leurs petits privilèges économiques, leurs échelons académiques ou intellectuels, absolument à l'écart de la souffrance et de l'injustice que vivent le peuple, le peuple qui meurt dans la misère la plus extrême et, évidemment, la population indienne. Cette insouciance est décrite avec une forte réprobation morale: ils font d'une pauvre indienne le sujet de leurs moqueries et jeux sans le moindre respect de sa dignité humaine. Sa critique est très dure mais, moi qui ai bien connu tout ce monde, ne peux qu'y souscrire. LC donne même le nom d'un capo des intellectuels de gauche à un personnage qu'il ridiculise par une énorme vanité, qui le rend même aveugle et sourd à ce qui se passe dans le reste de l'Amérique Latine. Ce personnage conclut une scène en disant quelque chose comme : « nous, les mexicains, en matière de révolution sommes à des années lumière devant tout ce que les autres "petits révolutionnaires" latinoaméricains ont fait. (le roman Ourania a été traduit en Argentine en 2007. Il est fort probable qu'il soit lu au Mexique et que cela ait échauffé encore plus les esprits. ).
Merci Rosario !
roses du cirque de Mafate