L'éléphant de mer de retour au Tremblet
La plage du Tremblet devait lui manquer. Pas très scientifique comme explication mais c'est la seule qu'on ait pour l'instant depuis que l'éléphant de mer a signé son retour dans le Sud sauvage. C'était hier matin, à l'aube. Notre visiteur somnolait tranquillement sur la plage de sable noir née de l'éruption du piton de la Fournaise d'avril 2007 dans le Grand-Brûlé lorsqu'un pêcheur local aperçoit le premier l'animal.
LES SCIENTIFIQUES AUX AGUETS
Aussitôt, il appelle Honoré Dumont, un habitué des lieux qui s'était déjà pris d'affection pour l'éléphant de mer lors de sa première visite, qui remonte à juin 2008. "En longeant le bord de mer, je suis tombé dessus. Il était visiblement en train de dormir et dès que je me suis approché il a reculé vers l'océan pour disparaître dans les vagues", explique celui qui l'avait observé sous tous les angles l'an dernier. Ce retour précoce par rapport à l'an dernier suffit à raviver la curiosité qu'il avait suscitée lors de sa première visite. Pour les scientifiques qui n'ont pas encore eu l'occasion de voir la bête, passé l'excitation, c'est le mystère de la présence d'un tel animal si loin de ses bases qui refait surface avec cette question : s'agit-il du même éléphant de mer que celui observé en août 2008 ou a-t-on affaire à un autre spécimen qui aurait à son tour craqué pour la plage du Tremblet ? "Nous ne sommes pas sûrs qu'il s'agisse du même éléphant de mer car il n'a pas pu être observé assez mais d'après les descriptions que les témoins en ont faites, il y a de sérieuses ressemblances, reconnaît Violaine Dulau, cétologue et membre de Globice. L'éléphant mesurerait dans les deux mètres, pèserait peut-être une tonne et serait dépourvu de trompe ce qui laisse penser qu'il s'agit d'un jeune sans pouvoir déterminer son sexe. L'association a d'ailleurs prévu d'envoyer une équipe sur place en fin de semaine pour observer l'animal si celui-ci daigne refaire une apparition. Le réseau échouage sera lui aussi mis en alerte. La présence du mammifère marin solitaire qui vit habituellement en colonie dans les îles Kerguelen reste toutefois inexpliquée. Car si l'animal est capable de parcourir plusieurs milliers de kilomètres sans toucher terre dans des eaux glacées, sa présence sous des latitudes subtropicales reste un fait exceptionnel. "L'éléphant de mer obéit à plusieurs cycles et habituellement il commence sa migration pendant l'hiver austral vers le mois de septembre", précise Violaine Dulau. Notre visiteur aurait donc un peu d'avance...
Pierre Verrière
Il est ici chez lui
Même s'il ne s'agit pas du même spécimen que celui observé en août 2008, l'éléphant de mer du Tremblet est ici chez lui. En dépit de l'intérêt que cette visite peut susciter, il faut se montrer respectueux à son égard. Comme les baleines, les éléphants de mer sont des animaux sauvages. Très peu habitués au contact des humains, ils doivent être approchés avec la plus grande prudence. Les scientifiques insistent d'ailleurs sur la nécessité de ne pas stresser l'animal. Inutile de préciser qu'un safari sauvage n'aurait pour que conséquence que de faire fuir celui qui nous donne peut-être une deuxième chance d'en savoir un peu plus sur lui. L'an dernier, les scientifiques l'avaient d'ailleurs laissé vivre sa vie. Rien à voir avec la chaîne de solidarité qui s'était tissée autour d'un autre éléphant de mer, baptisé Cyril, qui avait opté pour les plages mauriciennes en 2006. Il avait finalement été ramené aux Kerguelen - peut-être contre son gré d'ailleurs, qui sait ? Rien de tel n'avait été imaginé pour l'éléphant du Tremblet, finalement reparti comme il était venu. Gageons qu'il en fasse de même une nouvelle fois, mais pas trop vite. L'an dernier, il avait été aperçu pour la dernière fois en octobre...