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5 octobre 2009 1 05 /10 /octobre /2009 17:05
En un mois, de nombreux articles sont parus sur l'orthographe. Il y a eu aussi le bouquin de De Closets, que je n'ai toujours pas fini  (les vacances dans 4 jours vont faire du bien). Il faut faire la part des journalistes en mal de papier, des politiques qui n'arrivent pas à faire parler d'eux et de ceux qui raisonnent avec leurs seuls souvenirs du primaire et du collège car à notre époque, en matière d'éducation, tout le monde sans exception se considère compétent. Mais tout de même, cette fois-ci, il y a des gens de terrain (Danielle Cogis, Danielle Manesse, Jean-Claude Chevalier, Henriette Walter) qui ont consacré une grande partie de leur vie à réfléchir au problème. J'ai naturellement entendu les ronchons puristes qui recommandent la non-lecture de De Closets insultes à l'appui, et les ronchons-bobos de la post-modernité qui accusent les profs d'être responsables de l'échec scolaire de Monchéri et de Mohamed. Comme je me coltine le problème en ce moment avec des élèves de secondes et de 1STG très très faibles (orthographe niveau CE2 avec mots créoles) je me garderai bien de prendre parti trop vite et d'arbitrer dans un débat compliqué. Mais j'en reparlerai, avec du concret. Réformer la norme lexicale (avec l'orthographe recommandée de 1990), soit. Mais les problèmes de l'apprentissage orthographique ne se réduisent pas à cette réformette. Sinon, ça se saurait.

Les CV truffés de fautes éliminés
 Marie-Estelle Pech
03/09/2009  les postes sont élevés dans la hiérarchie, plus le niveau d'exigence augmente.

Devant la baisse du niveau en français des salariés, recruteurs et employeurs hésitent entre fata­lisme et exaspération. Les fautes envahissent bon nombre de lettres de motivation. Pour autant, certains semblent désormais partisans d'une dose de tolérance. L'orthographe deviendrait-t-elle moins discriminante ? « Si je traquais toutes les fautes, je ne recruterais plus grand monde», s'amuse Stéphane Morano, le patron d'une petite société d'informatique lyonnaise, Zipinfo, tout en précisant qu'il écarte d'office les lettres de motivation parsemées de «nombreuses» erreurs. «Tout est dans la mesure. Si la candidature proposée me semble sérieuse, je ne vais pas la rejeter parce que j'ai relevé trois fautes.Le fond prime sur la forme.»
L'un des recruteurs d'Intérim médical service, une agence de placement parisienne, explique qu'il examine les candidatures des infirmières ou des aides-soignantes même si elles comportent quelques fautes, car ces dernières «ne seront pas appelées à beaucoup rédiger».
Une partie de l'attention portée aux fautes d'orthographe dépend en réalité du métier exercé : «L'employé va-t-il être amené à beaucoup écrire ? Sera-t-il en contact avec des clients ? On n'attend pas le même niveau d'orthographe d'un carrossier et d'une secrétaire», explique-t-on, dans une agence Manpower. Pour autant chez Latac-Solerim, à Paris, une entreprise du bâtiment, la responsable laisse de côté les candidatures «avec trop de fautes» même pour des postes de terrassiers ou de manœuvres. «Une ou deux, ça passe, mais pas plus», dit-elle.
Les fautes d'orthographes restent par ailleurs rédhibitoires dans les branches professionnelles qui recrutent des cadres de haut niveau. Anne-Laure Misslin, responsable de recrutement pour D.L Developpement, une société d'audit et de conseil opérationnel aux entreprises se dit «assez effarée» par le niveau d'orthographe de certaines candidatures. «Un bon CV avec les compétences attendues mais qui a une lettre avec des fautes, je ne le retiens pas», explique-t-elle. Responsable d'une agence d'intérim spécialisée dans le domaine juridique, Steeve Clerget scrute aussi les fautes, «car une secrétaire juridique passe beaucoup de temps à rédiger».
La multitude des candidatures
D'un recruteur à l'autre, le niveau d'exigence et la sensibilité au sujet varient. Si, responsable du contrôle des risques dans une société de Bourse, Philippe se dit «intransigeant» et n'hésite pas à «mettre un CV à la poubelle» à la moindre faute détectée parce que «c'est une question de respect», d'autres s'interrogent davantage, comme ce chef d'une entreprise de design : «Pour moi, il y a faute et faute. Entre mettre un ou deux n à un mot et faire des barbarismes, il y a une nuance.» Seule certitude, si les recruteurs sont parfois tolérants, un texte «bourré» de fautes passe toujours très mal. «Face à une multitude de candidatures pour un même poste, ceux qui envoient un CV impeccableont évidemment plus de chance de franchir la première étape», com­mente un responsable du cabinet de recrutement Michael Page. Les coachs en orthographe ont donc encore de beaux jours devant eux.
«La grammaire est la clarté de la pensée»
 Propos recueillis par Natacha Polony
03/09/2009 | Pour le linguiste Alain Bentolila, un allègement des règles céderait à la démagogie.

Spécialiste de l'apprentissage du vocabulaire et de la grammaire, Alain Bentolila est l'auteur du Verbe contre la barbarie.
LE FIGARO - Que pensez-vous de l'appel lancé par François de Closets pour une simplification de l'orthographe ? 
Alain BENTOLILA - Il est dommage que pour des raisons démagogiques, quelqu'un comme lui se lance dans ce combat. Il faut au préalable distinguer orthographe usuelle et orthographe grammaticale. Tout le monde parle de simplifier l'orthographe, mais ce faisant, on mélange tout. Il est hors de question de simplifier la grammaire, car elle traduit la façon de penser la langue. Accorder des participes, conjuguer correctement un verbe sont des processus fondamentaux. Ils donnent à voir que tel verbe va avec tel sujet, que c'est bien celui-ci qui agit et non un autre, qu'un pronom est d'un genre particulier parce qu'il se rapporte à tel nom, que « laquelle » renvoie à Sophie et non à « Pierre ». Celui qui ne maîtrise pas ça ne parvient pas à structurer le monde et ses catégories. Ce qui transparaît à travers l'orthographe grammaticale est la clarté de la pensée. On ne simplifie pas la puissance de la pensée mise en mots.

Alain Bentolila : «Toute variation de l'orthographe doit être détachée de l'oral»
François de Closets parle de l'injustice qui frappe ceux qui ne sont pas doués d'une bonne mémoire visuelle. 
C'est une bêtise. Simplifier l'orthographe usuelle, la façon dont s'écrivent les mots, c'est rêver d'une coïncidence parfaite entre le son et la lettre. Cette correspondance est déjà de 85 % dans la langue française (elle est de 95 % en espagnol ou en italien et de 60 % en anglais). Il existe une façon de faire correspondre parfaitement la lettre et le son : c'est d'employer l'alphabet phonétique international. Mais ça ne garantit nullement que l'on comprenne ce que l'on retranscrit.
Quel est l'enjeu d'une réforme ? 
L'écriture est la sagesse de la langue, elle est ce qui transcende le temps, ce qui permet de transmettre à des siècles d'intervalle, de lier les générations et les cultures. Il faut que toute variation de l'orthographe soit une variation apaisée et détachée de l'oral
Orthographe : le débat sur la simplification est relancé
Natacha Polony
03/09/2009 |

L'orthographe grammaticale, qui traduit les liens entre les mots, ferait défaut à une part croissante des élèves.
En cette rentrée, l'essayiste François de Closets part en guerre contre une langue «figée» et des règles arbitraires. Au risque de jouer les apprentis sorciers alors que le niveau des élèves s'effondre et que le français finit par perdre son sens.

L'orthographe serait une passion française. Et voilà qu'en cette rentrée 2009, le livre de François de Closets, Zéro Faute, relance la polémique. Le journaliste et essayiste s'y proclame «nul» en orthographe et rescapé miraculeux d'une sélection injuste. Il plaide à grand renfort médiatique pour une «simplification» de cette orthographe française, selon lui à la fois arbitraire et figée.
Partisans d'une sacralisation de la langue contre pragmatiques conscients des difficultés de la jeunesse : l'opposition est si simple qu'elle passe largement à côté de l'essentiel. «On en est encore là  ! s'exclame Françoise Candelier, institutrice. Le problème est toujours posé à l'envers.» Car pour ces professeurs qui sont confrontés chaque jour à des jeunes largement fâchés avec la langue, une réforme de l'orthographe semble une marotte d'intellectuel cabotin. «L'argument de François de Closets sur les treize graphies du son “o” est aberrant, explique par exemple Agnès Joste, professeur de lettres. L'écrit sert à préciser l'oral. Si l'on écrivait “o” partout, on ne comprendrait plus rien, les textes ressembleraient à un sketch de Raymond Devos.» Et de citer l'Allemagne, qui a renoncé ces dernières années à sa réforme de l'orthographe : les Allemands ne comprenaient plus leurs journaux. En revanche, la tentative de l'Académie française en 1990 - qui portait notamment sur la ponctuation et sur les accents circonflexes - a suscité un tollé qu'elle ne méritait pas.
«C'est un poncif de dire que l'orthographe serait arbitraire», plaide Rachel Boutonnet, institutrice et auteur de Pourquoi et comment j'enseigne le b.a.-ba. «Elle l'est beaucoup moins qu'on ne l'imagine. Nombre de règles, si elles ne sont jamais explicitées, n'en existent pas moins. Il faut le prendre comme un jeu dont on apprend peu à peu les subtilités.» Mais cela n'amuse pas tout le monde. L'association Sauver les lettres soumet tous les ans 1 348 élèves à la même dictée du brevet de 1988 : entre 2000 et 2008, le niveau s'est effondré : ils ne sont plus que 14 % à obtenir la moyenne, et deux sur trois à récolter un zéro pointé. Mais rassurons François de Closets, plus aucun élève n'est pénalisé pour cela, et les consignes adressées aux correcteurs du baccalauréat interdisent de retirer plus de deux points pour l'orthographe.
«Ils transcrivent du son et pas du sens»
Marie-Pierre Logelin enseigne le français en lycée professionnel. «Pour 99,9 % d'entre eux, explique-t-elle, mes élèves n'ont pas la moindre orthographe. Pas de syntaxe, pas de ponctuation. Quand ils écrivent sous la dictée, ils transcrivent du son et pas du sens. Ils n'identifient pas les familles de mots, ni leur nature. Le problème relève de l'apprentissage de l'écriture. Ils peuvent par exemple écrire le même mot de deux façons différentes à une ligne d'intervalle, ce qui dénote une indifférence totale vis-à-vis de la norme.» En fait, cette orthographe arbitraire que dénonce François de Closets est celle que l'on dit «usuelle», qui consiste à savoir si «rationnel» prend un «n» ou deux, par opposition à l'orthographe grammaticale, qui désigne les accords de genre et de nombre, les conjugaisons… Or c'est bien cette dernière qui fait défaut à une part croissante de la population.
«Ce débat sur la complexité de la langue tombe à point nommé pour nous rassurer, ironise Françoise Candelier, pour nous persuader que le défaut de maîtrise de la langue qui frappe nos jeunes n'est dû qu'à la complexité du français. Mais comment expliquer, alors, que cela s'aggrave depuis quelques années ?» Si discrimination il y a, elle n'est pas le fait de la langue, plaident les professeurs, mais des programmes qui, jusqu'en 2007, demandaient d'«observer les variations des verbes selon la personne», mais pas d'apprendre les conjugaisons. Un élève de lycée a bénéficié en moyenne de 2 000 heures de cours de français dans sa scolarité, contre 2 800 il y a quinze ans. Réformer l'orthographe n'y changera rien.
Les nouvelles technologies, ennemies du bon français ? 
Agnès Leclair
03/09/2009 |

«Le papier est un support à l'ancienne qui évoque l'école et les règles strictes, rappelle le sociologue Serge Guérin. Tandis que, sur un média moderne, les gens se montrent plus souples et s'accordent le droit d'inventer d'autres normes.» Crédits photo : Le Figaro
SMS et abréviations utilisées sur Internet sont volontiers accusés de faire baisser le niveau.

«Si l'orthographe était libre - libre d'être simplifiée ou non, suivant l'envie du sujet -, elle pourrait constituer une pratique très positive d'expression», plaidait Roland Barthes en 1976 dans une tribune intitulée «Accordons la liberté de tracer». Un plaidoyer que les internautes et les amateurs de SMS se sont approprié sans complexe. C'est ainsi que «cadeau» s'est transformé en «kdo» et «demain» en «2m1», qu'«avant» a perdu son «t»…
L'abandon de la dictée
«Le papier est un support à l'ancienne qui évoque l'école et les règles strictes, rappelle le sociologue Serge Guérin. Tandis que, sur un média moderne, les gens se montrent plus souples et s'accordent le droit d'inventer d'autres normes.» Bien évidemment, la rapidité des messages échangés sur le logiciel de dialogue MSN pousse à la faute. Quant au langage «Texto» ou «SMS», il a aussi été créé pour réduire le nombre de caractères envoyés afin d'alléger ses factures téléphoniques. Mais cette nouvelle manière de rédiger phonétique marque également pour ses jeunes utilisateurs une appartenance à un groupe et une distanciation avec les règles.
«C'est aussi une protection, une manière d'empêcher les autres de mesurer son niveau d'orthographe. Ce langage libère la parole, alors que, quand on écrit une lettre, on a l'impression d'avoir sa maîtresse d'école derrière son épaule», note Serge Guérin. Mais, alors que le langage SMS est désormais utilisé en entreprise et qu'il inonde la Toile, certains vont jusqu'à craindre un abandon de l'orthographe traditionnelle. Les linguistes dénoncent plutôt l'abandon progressif de la dictée ou la manière d'enseigner le français. «En fait, les élèves savent qu'ils utilisent un code», rassure Danièle Manesse, professeur de sciences du langage.

Arrêtons avec les zétagénéros !
CLICANOO.COM | Publié le 20 septembre 2009
“L’enseignement de l’orthographe est en train de s’effondrer”. C’est le journaliste François de Closets qui l’écrit dans un essai intitulé “Zéro faute” et, franchement, on ne sait plus trop quoi en penser. Car de Closets, contre toute attente, n’en fait pas une maladie : d’accord, les jeunes écrivent aujourd’hui un peu n’importe comment, entre les courriels, les SMS et les chats sur MSN ; d’accord, l’écriture n’est plus tant “ce qui fixe la parole” que “de la conversation, du flux pas destiné à rester”. Mais, nous dit de Closets, “contrairement à ce que l’on avait envisagé, les gens écrivent de plus en plus”. Ce dont on ne peut que se réjouir. De fait, de Closets n’a pas tort, l’usage de l’écrit ressemble aujourd’hui à notre société tout entière : c’est du superficiel (souvent), du rapide (toujours) et du fonctionnel (forcément). Mais c’est tout de même de la communication.
L’ennui, c’est que la France avait sacralisé l’orthographe, en avait “fait un culte”, dit le journaliste. Et qu’aujourd’hui, nos djeun’s intègrent de moins en moins ce “respect fétichiste”. Mais le plus gros ennui, surtout, c’est qu’il est trop tard pour revenir en arrière. Que vous écriviez “événement” avec des “é”, des “è” ou bien “aivaineman”, aura de moins en moins d’importance, qu’on se le tienne pour dit. François de Closets en conclut donc qu’il vaut mieux insister sur la grammaire et le vocabulaire (le fond) plutôt que l’orthographe (la forme). Et ouvre la boîte de Pandore, brandit l’arme absolue : utilisons les correcteurs d’orthographes que contiennent nos ordinateurs “à condition que ce soit l’enseignant qui apprenne aux élèves à s’en servir”. On objectera que l’orthographe a tout de même un sens, dans une société. C’est à la fois une discipline que nous imposons à notre cerveau (ça ne fait jamais de mal), une forme de respect envers son lecteur, à qui l’écrivain n’impose pas sa propre forme d’écriture. C’est même, malheureusement parfois, un marqueur du niveau d’éducation : combien de CV et lettres de motivations sont jetées au panier à la seule vue de fautes d’orthographes ? N’en déplaise à François de Closets, l’orthographe restera encore longtemps un régulateur linguistique et social. En même temps, celui-ci ne demande qu’à ouvrir le débat et demande que soient organisés “des états généraux”. Là, on l’arrête tout de suite : les colloques de ce genre, on a déjà donné, et ça nous laisse sur notre faim (ou sur notre fin, ça dépend de la graphie). Et puis d’abord, désormais, on écrit “zétagénéros”. C’est plus facile, na !
David Chassagne - dchassagne@jir.fr
L'orthographe, un jardin à élaguer
LE MONDE | 30.09.09 | 14h38
Le récent ouvrage de François de Closets (Zéro faute, éditions Mille et Une Nuits, 318 p., 20,90 euros) rouvre le débat sur l'orthographe et nous souhaitons souligner quatre points. Tout d'abord, le problème est important. En effet, notre orthographe, l'une des plus difficiles du monde, ne peut être acquise qu'au prix de longs efforts couteux en temps et en argent. Elle pénalise les plus défavorisés et renforce la barrière sociale. Elle accroit le mal-être des dyslexiques. Elle nuit à la francophonie : quitte à apprendre une orthographe difficile, autant passer à l'anglais qui ouvre un marché linguistique autrement plus vaste.
Contrairement aux idées reçues, la complexité de l'orthographe ne relève pas de la fatalité. Dans le cas du français, elle apparait assez tardivement avec la fondation de l'Académie française par Richelieu. Jusque là il existait une grande variété d'usages sans préséance. Avec l'Académie, on assiste à la promotion d'un usage unique mais, par la suite, les Immortels ont constamment remanié leur propre norme, presque toujours dans le sens d'une régularisation : chaque édition de leur Dictionnaire - neuf au total - définit un nouvel état orthographique. Notre orthographe est donc une orthographe réformée et chaque usager est, qu'il le veuille ou non, un réformiste qui s'ignore.
Il reste que, malgré les corrections déjà effectuées, la convention orthographique actuellement en vigueur continue à poser bien des problèmes à bien des gens car le travail de régularisation n'est pas achevé.
Peut-être l'effondrement de la maitrise orthographique pourrait-il être ralenti par un accroissement massif de l'enseignement consacré à l'orthographe, mais où trouver les heures et le financement ? Se pose alors la question de nouvelles régularisations dans la continuité des précédentes. Certes, on peut juger qu'il est devenu inutile de réformer parce qu'il suffit de s'en remettre aux correcteurs orthographiques des ordinateurs, qui deviendront de plus en plus performants.
C'est exact s'agissant de l'orthographe de mots, mais cela est beaucoup moins vrai de l'orthographe grammaticale : l'accord du participe passé avec avoir reste éminemment réformable. D'autre part, cette option impose, surtout, que l'école enseigne à tous les élèves à se servir intelligemment de ces correcteurs de sorte que chacun conserve la pleine maitrise de ses textes. Ce recours aux correcteurs orthographiques implique aussi que tous les élèves francophones - y compris en Afrique et en Haïti - soient équipés gratuitement d'un matériel adéquat. Ce sont là de sérieuses gageüres.
Enfin, rien n'interdit de rêver mais, sans négliger les outils modernes, nous pensons qu'on peut tenir deux fers au feu et que l'Académie française doit poursuivre sa mission de régularisation. Les plus grands écrivains, comme Ronsard, Corneille, Racine ou Voltaire ont toujours activement combattu pour la rationalisation de l'orthographe.
L'Académie a réformé pour le plus grand bien de tous et, dans le même esprit, c'est-à-dire de façon modérée et progressive, elle doit cultiver cette tradition. Représentant par excellence les écrivains, elle pourrait le faire en liaison avec les enseignants et les linguistes, sans oublier les éditeurs, qui peuvent reprendre le flambeau de Tory, de Pelletier du Mans ou de Firmin-Didot. La presse aussi, dont Le Monde, doit jouer son rôle.
Les Recommandations de l'Académie française de 1990 sont maintenant largement adoptées par tous les dictionnaires et correcteurs informatiques et sont recommandées par le ministère de l'éducation nationale. L'orthographe n'est pas une vache sacrée à jamais intouchable mais un jardin que l'on doit entretenir avec respect en élaguant ce qu'il faut : l'orthographe est faite pour l'homme et non l'homme pour l'orthographe.
NB : ce texte est orthographié selon les Recommandations du Conseil supérieur de la langue française de 1990 approuvées par l'Académie française.

Bernard Cerquiglini, recteur de l'Agence universitaire de la francophonie ;
Jean-Claude Chevalier, professeur émérite (Paris-VII) ;
Pierre Encrevé, directeur d'études à l'EHESS ;
André Goosse, président du Conseil international de la langue française ;
Renée Honvault, linguiste ;
Jean-Pierre Jaffré, lingusite ;
Jean-Marie Klinkenberg, président du Conseil de la langue française ;
Gilbert Lazard, de l'Institut ;
Michel Masson, professeur émérite (Paris-III) ;
Bernard Quemada, directeur de recherches au CNRS ;
Henriette Walter, professeur à l'université de Haute-Bretagne ;
Viviane Youx, présidente de l'Association française des enseignants de français.
Article paru dans l'édition du 01.10.09.
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