Cher Dadapierre
Lorsque je t'ai conduit de Ramena à Diego début mai pour que tu voies le médecin agréé pour les rapatriements sanitaires, je n'imaginais pas qu'on se voyait pour la dernière fois. J'ai essayé de
te téléphoner à l'hôpital de Saint-Pierre et tu as dû reconnaître ma voix, sans force pour me répondre. Patricia me donnait de tes nouvelles. Et mercredi son SMS m'a averti que tu nous avais
quitté.
Depuis, le chagrin est immense à Ramena. Le lendemain, tes enfants te pleuraient au cimetière du Tampon. Ils ont bien compris que mon amie Lydia était là pour eux, pour les enfants et les
maîtresses de Ramena, pour toi. Au même moment, j'ai rencontré Lylian Payet, le Président des Cent Pieds http://lescentpieds.monsite-orange.fr/, l'ancien sénateur de la Réunion. Dans l'hôtel
Kartiffa de Diego, nous avons évoqué le travail de pionniers des Cent Pieds, ces randonneurs réunionnais qui ont fait confiance à Dadapierre, qui l'ont aidé généreusement dès le début et qui vont
continuer de nous aider, je pense à Evelyne et José par exemple. Nous avons parlé de la cérémonie qui allait avoir lieu quelques heures plus tard en ton honneur à La Maternelle. Je me devais
d'être au lycée avec mes collègues et j'ai laissé Lylian rejoindre les maîtresses sans moi. Zina a pris les photos où l'on voit que les 100 enfants inscrits dans tes 2 écoles honorent ta mémoire
avec dignité pour empêcher l'oubli. En eux, brûle un feu que Monique, Sandra, Rachida, Marie, Paulette, Zina, Nathalie, Sylvia et d'autres maîtresses vont entretenir.
Lorsque tu m'as dit en mai 2010 à Saint-Gilles les bains : "Jean-Claude tu prends ma suite", j'étais immensément heureux mais aussi très intimidé : comment être sûr d'être à la hauteur ? Comme tu
n'étais pas loin (France ou Niger), que tu reviendrais, que l'on m'offrait aussi un service d'enseignement au lycée français, je n'ai pas hésité à me lancer dans l'aventure. Quel beau cadeau !
Bien que tu ne m'en aies pas beaucoup parlé, j'imagine bien les moments de découragement que tu as dû surmonter : problèmes de terrain, d'écollage, de parrainage, de recrutement et de formation
des maîtresses, de construction et d'équipement des locaux.
A présent, tu es loin. Lylian aussi souhaite que je te remplace. Mais personne ne peut remplacer Dadapierre. Je peux seulement promettre que tous mes efforts iront à la formation des maîtresses
de tes écoles, que je ferai tout mon possible pour que les élèves de la Maternelle et ceux de ton école primaire réussissent leurs études. Qu'en parlant autour de moi, on trouvera de nouveaux
généreux donateurs et parrains. Et que personne n'oubliera que sans toi il n'y aurait pas d'école du tout, que chaque année 30 enfants de plus n'apprendraient pas à lire.
Merci Dadapierre.