photo prise sur la Divatte près de Mauves début janvier 2013
Ma réserve de bois s'amenuise.
Je vais en recommander. Et aller le chercher. Du chêne.
Si les bûches sont trop grosses pour mon petit Godin, j'ai un coin et une masse pour les fendre.
Mais déjà j'entends Pierre de Ronsard : "Ecoute bûcheron, arrête un peu le bras".
Oui oui mais il fait froid.
N'empêche. La forêt amazonienne, le poumon de l'humanité, continue d'être livrée aux fanatiques de l'enrichissement personnel. Le trafic de bois de rose malgache et celui des grumes ivoiriens
prospèrent.
Il y a 3 semaines, j'ai visité une modeste expo à la médiathèque de Vertou, une expo consacrée aux principaux arbres. Avec une réflexion pédagogique derrière. Pour chaque arbre était rappelée sa
valeur symbolique, ses cautions culturelles :
- pommier : de Morgane à Guillaume Tell en passant par Herakles, la guerre de Troie et NYC
- abricotier : arbre venu d'extrême-orient, associé à la longévité
- noyer : grâce auquel nous fabriquons le légendaire vin de noix
- if : fait communiquer le monde des vivants avec celui des morts
- bouleau : peut vivre 150 ans, écorce imputrescible avec laquelle on fume truites et saumons, sert à fabriquer les manches des pinceaux
- acacia : symbole de resurrection, bois dont fut faite l'Arche d'Alliance de Moïse ; sa résine entre dans la composition des loukoums
- frêne : symbole de puissance ; le javelot d'Achille était en frêne
- aubépine : arbre dans lequel fut confectionnée la couronne du Christ (épines et bois extrêmement durs), prospérité, bonheur
- érable : emblème du Canada et grâce auquel on peut déguster un excellent sirop
- houx : déjà les romains s'en servaient lors des Saturnales pour décorer ; il est vert toute l'année, c'est pourquoi il symbolise durée et stabilité ("je mettrai sur ta tombe / Un bouquet de
houx vert et de bruyère en fleur") il peut vivre 300 ans et mesurer 10 m de haut ; apprécié en ébénisterie
- platane : arrive en France au milieu du XVIIIè ; précieux pour son ombre et pour son bois (jouets, ustensiles de cuisine, équerres)
- noisetier (on dit aussi coudrier) : symbole de réconciliation et de fécondité ; la baguette de noisetier d'Hermès, avec 2 serpents enroulés, a donné le caducée ;
- châtaignier : autrefois les forêts de châtaigniers étaient très étendues (chauffage et alimentation cf Cévennes, Limousin, Corse) ; aimé des charpentiers car son bois repousse les insectes
- cerisier : on a retrouvé des peintures de cerisiers à Pompéi ; symbole de la malchance (la guigne) ; les cerisiers en fleurs sont très présents dans les estampes japonaises ; kirsch, marasquin,
clafoutis, babioles, bigarreaux, griottes : on les aime
- cèdre : symbole d'immortalité ; peut vivre jusqu'à 800 ans ; c'était le bois des barques égyptiennes : celle du pharaon Kheops retrouvée en 1954 dégageait encore une forte odeur de cèdre ;
emblème du Liban ; les totems indiens étaient sculptés dans du cèdre
- aulne : bois lèger, imputrescible, c'est le bois du sabotier ; peut vivre jusqu'à 350 ans
- tilleul : symbole de l'amour conjugal car il renvoie à Philémon (changé en chêne) et Baucis (changée en tilleul) ; apprécié pour ses tisanes
- chêne : couronnes de feuilles de chêne en Grêce ancienne, armures de vaincus accrochées au tronc d'un chêne chez les romains, secrets transmis entre druides à l'abri d'un chêne symbole de force
et de solidité, justice rendue par Saint-Louis sous un chêne, concours avec le roseau chez La Fontaine, les références aux chênes sont innombrables, sans compter les figurines que nous avons tous
réalisées avec des glands et des allumettes
Cette expo avait prévu un jeu de l'oie, des questionnaires pédagogiques, des photos, des branchages (au feuillage raréfié comme il se doit en janvier), mais il manquait l'info parvenue il y a 8
jours grâce à la dendrochronologie pratiquée sur des arbres âgés de 1240 ans, par ex le cèdre du Japon (cryptoméria). Une étude qui affirme que la terre a été bombardée par des rayons gamma à la
fin du VIIIè siècle. Les hommes capables d'écouter des êtres vivants sages d'autant d'années existent-ils ?
les 5 photos ci-dessous : prises devant l'église de Vertou début janvier
platane (Vertou)
chêne (Mauves)
bouleau (périph sud nantes)
http://www.lefigaro.fr/sciences/2013/01/21/01008-20130121ARTFIG00839-la-terre-a-ete-bombardee-par-des-rayons-gamma.php
La Terre a été bombardée par des rayons gamma
La trace de cet événement cosmique, survenu au VIIIe siècle, vient d'être détectée dans les cernes de croissance d'arbres.
Une explosion de rayons gamma, provoquée par la collision de deux trous noirs ou de deux étoiles à neutrons, serait à l'origine de l'intense bombardement cosmique qui a frappé la Terre à la fin
du VIIIe siècle.
La trace de ce mystérieux événement a été signalée en juin dernier par des chercheurs de l'université de Nagoya (Japon). L'équipe de Fusa Miyake a découvert, dans les anneaux de croissance de
deux cèdres du Japon (Cryptomeria japonica) correspondant aux années 774 et 775, une forte et rapide hausse de leur concentration en carbone 14, d'environ 1,2 %. D'autres relevés réalisés sur des
arbres d'Amérique du Nord et d'Europe montrent un pic similaire, preuve que le phénomène a touché une bonne partie de l'hémisphère Nord.
Supernova, tempête solaire particulièrement violente? Lorsqu'ils publient leurs résultats dans la revue britannique Nature , les scientifiques japonais avouent ne pas être en mesure «de préciser
les causes de cet événement» hors norme. Une supernova survenue à une époque aussi récente (à l'échelle cosmique) serait encore détectable aujourd'hui. Quant à l'activité solaire, elle serait
hors de cause. L'augmentation de 1,2 % enregistrée dans les arbres japonais est, au bas mot, quatre fois supérieure à celles enregistrées lorsque le Soleil est à son maximum d'activité.
À 3 000 années-lumière
Cette semaine, deux scientifiques de l'Institut d'astrophysique de l'université d'Iéna (Allemagne) avancent une autre explication. En calculant le rapport entre les traces de béryllium 10
retrouvées en Antarctique et datant de la même époque, avec les concentrations en carbone 14 des cèdres nippons, Valeri Hambaryan et Ralph Neuhäuser estiment que les valeurs correspondent à un
«sursaut gamma» de type court.
«Ces phénomènes, dont l'origine n'est bien comprise que depuis quelques années, sont parmi les plus violents de l'Univers, explique Stéphane Corbel, astrophysicien au CEA. On en distingue des
longs, qui durent une dizaine de secondes, et des courts (moins de deux secondes). Ces derniers proviennent de la collision entre deux étoiles à neutrons ou deux trous noirs. En s'effondrant l'un
sur l'autre, ces objets célestes extrêmement massifs libèrent une énergie phénoménale et des rayons gamma, la forme la plus intense du rayonnement électromagnétique.»
La brièveté de l'émission et le caractère invisible des rayons gamma expliquent également pourquoi l'événement n'a pas été perçu par les hommes de l'époque, soulignent Valeri Hambaryan et Ralph
Neuhäuser, qui viennent de publier leurs travaux dans le dernier numéro de la revue de la Royal Astronomical Society britannique. Selon eux, le sursaut gamma de 774-775 est survenu à au moins 3
000 années-lumière, sans quoi toute forme de vie aurait été rayée de la surface de notre planète.
Aujourd'hui, «même à des milliers d'années-lumière, un événement similaire sèmerait le chaos dans les systèmes électroniques très sensibles dont dépendent les sociétés avancées», indique Ralph
Neuhäuser. Fort heureusement, ce genre de tempête cosmique est plutôt rare. «Au cours des 3000 dernières années, l'âge maximal des arbres encore vivants aujourd'hui, il semble qu'un seul
événement de ce type ait eu lieu», précise le scientifique
Au 8e siècle, des rayons gamma ont bombardé la Terre
Créé le 21-01-2013 à 10h34 - Mis à jour à 15h14
Sciences et Avenir
Par Sciences et Avenir
Des chercheurs émettent l'hypothèse que deux objets stellaires sont entrés en collision à 3000 années-lumière de la Terre et auraient fusionné, déclenchant un déchaînement d'énergie.
RAYONNEMENTS. Une explosion de rayons gamma, peut-être provoquée par la collision de deux trous noirs, serait à l'origine de mystérieux rayons cosmiques qui ont frappé la Terre à la fin du 8e
siècle, estiment des astronomes dans une étude publiée lundi.
En juin dernier, des chercheurs japonais avaient découvert, inscrite dans les anneaux de troncs d'arbres, la trace de rayonnements émis par un événement cosmique inexpliqué. Et ils avaient
précisément daté ce phénomène de l'an 774 ou 775 sans pouvoir lui trouver d'explication satisfaisante.
CERNE. Fusa Miyake et ses collègues de l'université de Nagoya (Japon) avaient analysé le carbone 14 (une variété radioactive de carbone qui se forme lorsque les rayons cosmiques traversent les
atomes de l'atmosphère terrestre) contenu dans les anneaux de croissance de deux cèdres du Japon.
Dans les cernes des deux arbres correspondant aux années 774 et 775, ils avaient mis en évidence une hausse anormale du taux de carbone 14, d'environ 1,2%. C'est environ vingt fois supérieur aux
variations attribuées aux changements de l'activité du Soleil. Le phénomène ne pouvait avoir été uniquement localisé car il correspond à d'autres relevés déjà réalisés sur des arbres d'Amérique
du Nord et d'Europe.
CRUCIFIX. L'hypothèse d'une éruption solaire avait été écartée car ces événements ne peuvent pas être assez puissants pour entraîner une telle hausse de carbone 14. Des chercheurs avaient alors
souligné que des chroniques médiévales faisaient état d'un "crucifix rouge" apparu dans le ciel après le coucher du soleil, suggérant qu'il pouvait s'agir de l'explosion d'une supernova. Mais
l'événement est daté de l'an 776 et aurait laissé d'autres traces physiques.
Davantage d'énergie en quelques secondes que le Soleil en des milliards d'années
Deux scientifiques de l'Institut d'astrophysique de l'université allemande d'Iéna proposent une autre explication à ce mystérieux bombardement de rayons cosmiques : un très bref "sursaut
gamma".
Phénomènes les plus lumineux de l'univers, les "flashes" ou sursauts de rayons gamma émettent, en quelques secondes pour les plus courts, davantage d'énergie que le Soleil en des milliards
d'années d'existence. Selon Valeri Hambaryan et Ralph Neuhäuser, un tel flash gamma correspondrait parfaitement à la brusque augmentation de carbone 14 et à l'absence de témoignages
historiques.
FUSION. Dans une étude publiée le 17 janvier par la Royal Astronomical Society britannique, les astronomes suggèrent que deux objets stellaires très compacts - trous noirs, étoiles à neutrons ou
naines blanches - seraient entrés en collision et auraient fusionné, provoquant ce déchaînement d'énergie et de rayonnements électromagnétiques.
Une fusion survenue à au moins 3.000 années-lumière
Une telle fusion entraîne un sursaut gamma aussi intense que bref, qui dure généralement moins de deux secondes, ce qui expliquerait pourquoi il n'a pas été aperçu à l'époque par des observateurs
terrestres. Grâce à leurs instruments modernes, les astronomes peuvent aujourd'hui assister à ces événements dans des galaxies lointaines plusieurs fois par an.
CHAOS. Mais si ce phénomène est à l'origine des rayonnements cosmiques enregistrés en 774-775, alors la fusion est survenue à au moins 3.000 années-lumière, sans quoi toute forme de vie aurait
été rayée de la surface de notre planète, soulignent les auteurs.
"Si le sursaut gamma avait été plus proche, il aurait causé d'importants dégâts à la biosphère. Mais même à des milliers d'années-lumière, un événement similaire sèmerait aujourd'hui le chaos
dans les systèmes électroniques très sensibles dont dépendent les sociétés avancées", indique Ralph Neuhäuser.
Selon lui, le sursaut gamma enregistré au 8e siècle provenait d'un système stellaire distant de 3.000 à 12.000 années-lumière du Soleil. "Reste maintenant à déterminer la rareté de tels pics de
carbone 14, c'est-à-dire la fréquence à laquelle des sursauts gamma touchent la Terre. Au cours des 3.000 dernières années, l'âge maximum des arbres encore vivants aujourd'hui, il semble qu'un
seul événement de ce type ait eu lieu", précise M. Neuhäuser.
AD avec AFP
Sciences et Avenir
21/01/2013
Le buffet
C'est un large buffet sculpté ; le chêne sombre,
Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens ;
Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre
Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants ;
Tout plein, c'est un fouillis de vieilles vieilleries,
De linges odorants et jaunes, de chiffons
De femmes ou d'enfants, de dentelles flétries,
De fichus de grand'mère où sont peints des griffons ;
- C'est là qu'on trouverait les médaillons, les mèches
De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches
Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.
- O buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
Quand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires.
Arthur Rimbaud (oct 70)
Une famille d’arbres
C’est après avoir traversé une plaine brûlée de soleil que je les rencontre.
Ils ne demeurent pas au bord de la route, à cause du bruit. Ils habitent les champs incultes, sur une source connue des oiseaux seuls.
De loin ils semblent impénétrables. Dès que j’approche, leurs troncs se desserrent. Ils m’accueillent avec prudence. Je peux me reposer, me rafraîchir, mais je devine qu’ils m’observent et se défient.
Ils vivent en famille, les plus âgés au milieu, et les petits, ceux dont les premières feuilles viennent de naître, un peu partout, sans jamais s’écarter.
Ils mettent longtemps à mourir, et ils gardent les morts debout jusqu’à la chute en poussière.
Ils se flattent de leurs longues branches pour s’assurer qu’ils sont tous là, comme les aveugles. Ils gesticulent de colère, si le vent s’essouffle à les déraciner. Mais entre eux aucune dispute. Ils ne murmurent que d’accord.
Je sens qu’ils doivent être ma vraie famille. J’oublierai vite l’autre. Ces arbres m’adopteront peu à peu, et pour le mériter, j’apprends ce qu’il faut savoir :
Je sais déjà regarder les nuages qui passent.
Je sais aussi rester en place.
Et je sais presque me taire.
Jules Renard
Le cageot
A mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot, simple caissette à claire-voie vouée au transport de ces fruits qui de la moindre suffocation font à coup sûr une maladie.
Agencé de façon qu'au terme de son usage il puisse être brisé sans effort, il ne sert pas deux fois. Ainsi dure-t-il moins encore que les denrées fondantes ou nuageuses qu'il enferme.
A tous les coins de rues qui aboutissent aux halles, il luit alors de l'éclat sans vanité du bois blanc. Tout neuf encore, et légèrement ahuri d'être dans une pose maladroite à la voirie jeté
sans retour, cet objet est en somme des plus sympathiques - sur le sort duquel il convient toutefois de ne s'appesantir longuement.
F. Ponge, Le Parti pris des choses, 1942
9 août 1940 – Le soir : « Non ! Décidément, il faut que je revienne au plaisir du bois de pins. De quoi est-il fait, ce plaisir ? – Principalement de ceci : le bois de pins est une pièce de
la nature, faite d’arbres tous d’une espèce nettement définie ; pièce bien délimitée, généralement assez déserte, où l’on trouve abri contre le soleil, contre le vent, contre la visibilité ; mais
abri non absolu, non par isolement. Non ! C’est un abri relatif. Un abri non cachottier, un abri non mesquin, un abri noble. C’est un endroit aussi (ceci est particulier aux bois de pins) où l’on
évolue à l’aise, sans taillis, sans branchages à hauteur d’homme, où l’on peut s’étendre à sec, et sans mollesse, mais assez confortablement. Chaque bois de pins est comme un sanatorium naturel,
aussi un salon de musique…une chambre, une vaste cathédrale de méditation (une cathédrale sans chaire, par bonheur) ouverte à tous les vents, mais par tant de portes que c’est comme si elles
étaient fermées. Car ils y hésitent…. Je crois que je commence à me rendre compte du plaisir propre aux bois de pins. »
12 août 1940 -- « Une infinité de cloisonnements et de chicanes fait du bois de pins l’une des pièces de la nature les mieux combinées pour l’aise et la méditation des hommes. Point de feuilles
s’agitant. Mais au vent comme à la lumière tant de fines aiguilles sont opposées qu’il en résulte une températion et comme une défaite presque complète, un évanouissement des qualités offensives
de ces éléments et une émanation de parfums puissants. La lumière, le vent lui-même y sont tamisés, filtrés, freinés, rendus bénins et à proprement parler inoffensifs. Alors que les bases des
troncs sont parfaitement immobiles, les faîtes sont seulement balancés… »
F. Ponge, le bois de pins
Pierre de Ronsard (1524-1585)
"À la forêt de Gastine"
Couché sous tes ombrages verts,
Gastine, je te chante
Autant que les Grecs, par leurs vers
La forêt d'Érymanthe :
Car, malin, celer je ne puis
À la race future
De combien obligé je suis
À ta belle verdure,
Toi qui, sous l'abri de tes bois,
Ravi d'esprit m'amuses ;
Toi qui fais qu'à toutes les fois
Me répondent les Muses ;
Toi par qui de l'importun soin
Tout franc je me délivre,
Lorsqu'en toi je me perds bien loin,
Parlant avec un livre.
Tes bocages soient toujours pleins
D'amoureuses brigades
De Satyres et de Sylvains,
La crainte des Naïades !
En toi habite désormais
Des Muses le collège,
Et ton bois ne sente jamais
La flamme sacrilège !