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1 juin 2009 1 01 /06 /juin /2009 17:09


Le créole réunionnais et la question orthographique

Colloque organisé par la Région, Lofis la lang

href="http://www.temoignages.re/le-vote-utile-pour-l-alliance-des,36955.html"jeudi 28 mai 2009

Éclairages pluridisciplinaires pour une orthographe fonctionnelle et consensuelle du créole réunionnais.

Hier, première journée pour ce colloque, le 4e organisé par Lofis la lang. A l'ouverture, le président de cette structure, Axel Gauvin expliquait que c'était un grand moment, parce que cela représente un pas de plus dans la longue marche du créole réunionnais dans sa quête de codes et de principes orthographiques. Un colloque dans lequel se retrouvent de nombreux partenaires : la Région, mais aussi le CHArt, laboratoire de recherches de l'université de Paris 8, l'Université de La Réunion et notamment le laboratoire de recherches et d'études créolophones et francophones, affilié au CNRS, le CCEE et de nombreuses associations comme Tikouti.

Axel Gauvin rappelait les missions de Lofis La lang : A LOFIS, nous pensons que le français et le créole doivent être partenaires. Il ne s'agit pas de remplacer l'une par l'autre, ni de dénigrer l'une au profit de l'autre. L'Office de La Langue Créole La Réunion est une association née des rencontres à l'issue des journées de la culture organisées par la Région en 2004. Dans l'atelier consacré à la Culture et la Langue, nous avons assisté à un affrontement d'idées. Certains étaient pour une revendication à tout craindre avec même l'application stricte des lois qui existent déjà. Et d'autres étaient pour une philosophie différente : changer les représentations. Le créole possède une place considérable dans notre société. Dire qu'il est complètement dévalorisé serait faux : on chante en créole, on écrit en créole, on compose en créole, on enseigne déjà en créole. En revanche, il y a malgré tout un déficit de représentation et notre travail consiste à valoriser la langue créole. De ces journées est née LOFIS avec l'aide de la Région. C'est d'ailleurs le 3 mars 2006 dans l'hémicycle de la Région que les choses se sont décidées. Ensuite, l'association a été créée. Notre philosophie peut se décliner en quelques mots : Valoriser, bien sûr, mais pour cela il faut comprendre. Pour comprendre c'est la discussion, nous faisons intervenir des experts. Il faut comprendre, il faut observer. Nous possédons un important programme de sondage et d'enquêtes. Observer, comprendre, convaincre, reste maintenant servir. Nous voulons par notre action et grâce aux partenariats, servir la langue. Ce qui veut dire, servir les gens qui parlent la langue.

Radjah Véloupoulé, président de la commission de l'épanouissement au conseil régional rappelait le partenariat privilégié existant entre la Région et Lofis. La Région soutient la langue créole par sa valorisation, sa promotion, la reconnaissance de ses expressions culturelles et le renforcement de son usage. Il s'agit dans ce cadre de promouvoir le bilinguisme, d'améliorer les conditions de transmission de la langue et de l'écriture, de développer leur usage et de soutenir les diverses formes d'expression culturelles via l'enseignement de cette langue dans les établissements scolaires. Par conséquent, la Région a toujours encouragé le travail entrepris par "Lofis la lang" dont la mission principale, (outre de permettre à la Région de conduire une politique régionale linguistique ambitieuse), est de proposer et de mettre en œuvre des actions destinées à promouvoir la langue créole dans le cadre d'un bilinguisme français /créole harmonieux. Il rappelait que la structuration de la langue française avait connu un parcours de 240 ans, et que cette langue continue d'évoluer. Il rendait hommage à tous ceux qui oeuvraient pour l'émergence de la langue réunionnaise, « nou tout met la main ansamn pou détak la lang et demay lo ker ».

 

Un sondage Ipsos sur la langue créole

Fabrice Georger, habilité à enseigner la Langue et Culture Réunionnaises (LCR), il a mis en place un enseignement bilingue en maternelle à La Réunion pendant 3 ans. Doctorant en sciences du langage, coauteur de "Oui au créole, oui au français" ; auteur de "Créole et français : deux langues pour un enseignement" et coordonnateur du Conseil scientifique de Lofis la Lang Kréol La Rénion), il a intitulé son intervention : "Analyses d'écritures spontanées du créole dans un corpus recueilli et catégorisé dans le cadre d'une enquête Ipsos-Lofis". En mars et avril 2007, Ipsos Réunion a donc réalisé pour le compte de Lofis la lang Kréol La Rénion un sondage auprès d'un échantillon de 505 personnes représentatives de la population réunionnaise. Ce sondage concernait en partie l'écriture de la langue créole. 71% des personnes interrogées ont déclaré écrire occasionnellement ou régulièrement en créole. 80% de ces scripteurs ont accepté de se soumettre à un test d'écriture après écoute d'une phrase pré-enregistrée d'une vingtaine de mots. Les 361 échantillons d'écriture récoltés, représentatifs des habitudes d'écriture spontanées des Réunionnais, sont riches d'enseignement. Il a ainsi présenté les statistiques réalisées à partir de ces écritures spontanées, les a analysées, tout en prenant garde aux conclusions hâtives sur ce que devrait être une orthographe du créole réunionnais, il a également tenu à ne pas faire dire aux chiffres ce qu'ils ne disent pas. Et de proposer des pistes de recherches complémentaires.

 

Les interventions du mercredi

• Charles Tijusest professeur de psychologie cognitive à l'Université Paris VIII, directeur du Laboratoire E.A. 4004 "Cognitions Humaine et Artificielle". (...) Il évoquait les liens entre le parler et penser créole et une sorte d'entrée en dissidence, on se distingue en parlant créole, mais aussi on se rassemble ; On se différencie mais on se regroupe. Différencier ce qui est créole de ce qui ne l'est pas. Et de conclure sur le fait que l'on peut aussi orthographier des concepts.

  • Daniel Wattin, directeur de LCF (laboratoire d'études et de recherches créolophones et francophones de l'Université de La Réunion), affilié au CNRS soulignait l'importance que revêt un tel colloque pour l'université. Il rappelait que vers 1970 étaient apparues les premières descriptions systémiques du créole. Et de conclure sur la volonté de l'université de continuer le partenariat avec Lofis.
  • Marie-Christine Hazaël-Massieux, professeur de linguistique à l'Université Aix-Marseille, a ouvert ce colloque sur ce thème: "De la transcription à l'orthographe".Pour elle, l'accès à l'écriture d'une langue se fait selon différentes étapes: bien avant de songer à une orthographe fonctionnelle, on commence par une transcription phonétique, qui fait d'ailleurs apparaître clairement le fait que tout le monde ne prononce pas de la même façon. Faut-il choisir dès lors une prononciation, faut-il tenir compte de toutes les prononciations (...). Des questions culturelles, sociales, politiques, voire historiques et anthropologiques se posent à ceux qui essayent de doter une langue (nouvelle) d'un système graphique cohérent et efficace pour la communication. (...) On ne parlera d'orthographe que beaucoup plus tard, quand après avoir trouvé un système graphique à peu près accepté par tous. (...)

    Teddy Gangama, poète, auteur de pièces de théâtre, de contes (Zamal Game, Dékolonant pa nou), a aussi écrit articles scientifiques traitant de la situation du réunionnais ou du thème du maloya, musique traditionnelle relevant du champ de la littérature orale. Responsable d'un magazine bilingue créole/français, il est intervenu sur le thème: "La graphie, l'agraphie du créole réunionnais: état des lieux". Il s'agissait de faire un état des lieux des quatre graphies les plus utilisées pour écrire le réunionnais, en regard de leur apparition chronologique et de leur utilisation dans le champ littéraire et artistique réunionnais. (...)
  • Philippe Fabing, directeur de recherche des sondages IPSOS-Lofis sur le créole, et aujourd'hui co-gérant associé de SAGIS sarl - Réunion, société spécialisée dans la collecte et le traitement d'informations et de données a évoqué la question des représentations des Réunionnais sur les écritures du créole. Car, à 'occasion de deux enquêtes réalisées auprès de la population Réunionnaise, il a été possible de collecter à la fois des avis, mais aussi des "extraits de pratiques" de lecture ou d'écriture en langue Créole (collectes "d'échantillons d'écriture" et enregistrement "d'échantillons de lecture"). érentes options de graphies ont ainsi été soumises à l'appréciation des personnes interrogées (1000 en tout, dont 500 sur les pratiques d'écriture et de lecture). (...)
  • Claire Lalevée-HUART est en thèse de sciences du langage sous la direction d'Anne Vilain au Département Parole et Cognition, laboratoire GIPSA-Lab (UMR 5216), Université Stendhal Grenoble. Elle a développé le thème: "Quelle graphie du créole réunionnais pour une facilité de lecture orale?" Ce travail a eu pour but d'évaluer la graphie la plus adaptée à la lecture du créole du réunionnais dans le cadre d'une réforme de l'orthographe de celui-ci. (...)
  • Mylène EYQUEM, formatrice à l'IUFM, puis maître de conférences en Sciences du langage à l'Université de La Réunion, elle poursuit ses travaux concernant la description des pratiques et usages de locuteurs réunionnais en particulier en milieu urbain. Son intervention portait sur le thème: "Graphies d'enseignes commerciales réunionnaises: efficacité pragmatique et communication créole moderne". Longtemps cantonné à la sphère privée, objet de minoration voire de stigmatisation dans les situations formelles, le créole réunionnais se risque à apparaître aujourd'hui dans des lieux où il n'était guère de mise auparavant, notamment dans les espaces publics convenus. (...) Plus inhabituel, il se montre parfois sous une version écrite. En effet, on voit à présent fleurir à La Réunion des publicités sous forme d'affiches, de tracts, de spots télévisuels. (...)

 

 

Deuxième journée du Colloque organisé par la Région, Lofis la lang

Le créole réunionnais et la question orthographique

Éclairages pluridisciplinaires pour une orthographe fonctionnelle et consensuelle du créole réunionnais

href="http://www.temoignages.re/rassemblement-autour-de-l-alliance,36991.html"samedi 30 mai 2009

 

http://www.temoignages.re/le-creole-reunionnais-et-la,36990.html

La deuxième journée de ce colloque s'est déroulée dans les locaux de l'Université de La Réunion. Comme lors de la première journée, les débats ont été riches et fructueux. Compte-rendu des interventions.

Arnaud Carpooran, docteur et associate professor linguistique à l'Université de Maurice, est membre de bon nombre de comités : Comité scientifique du Réseau Dynamique des Langues et Francophonie de l'Agence universitaire de la Francophonie ; du Comité International des Etudes créoles. Il a choisi de porter son intervention sur le thème "Grafi Larmoni" ou le compromis réalisé pour le créole mauricien ? 2004 est une date importante dans l'histoire de l'orthographe du créole mauricien car c'est à cette période qu'a été rendu public le rapport Grafi-Larmoni commandité par le gouvernement mauricien d'alors et qui contenait des propositions pour une orthographe dite harmonisée (d'où le nom du rapport) du créole mauricien. La portée historique du rapport ne tient pas tant au fait qu'il ait réussi à modifier le statut officiel du créole - cette langue demeure encore aujourd'hui une langue minorée - ni qu'il ait provoqué de bouleversements notables dans l'utilisation que les gens et des institutions en ont toujours faite, mais plutôt parce qu'il a mis symboliquement fin aux sempiternelles querelles entre praticiens de l'écriture en créole, source de bien de blocages jusqu'alors dans les débats visant à faire avancer la question. Arnaud Carpoouran est notamment revenu sur le climat et les événements sociopolitiques qui ont contribué à rendre possible la mise sur pied de ladite commission ; par ailleurs, il a présenté, rapidement, les faits techniques saillants contenus dans le rapport en question. Il a terminé sa contribution par une l'évocation de quelques aspects constitutifs de ce que l'on pourrait appeler « l'après Grafi-Larmoni »dans le domaine de l'enseignement, de la presse et de l'édition à Maurice.

Eric Robin,qui est responsable des Editions Epsilon depuis 1997, enseigne en Licence et Master au département InfoCom de la Faculté des lettres de l'Université de La Réunion. Il a été rédacteur en chef du magazine Plein Sud, et, à ce titre, a inscrit son propos sur le thème "Un éditeur face à la diversité graphique". Il expliquait que Epsilon éditions, éditeur implanté à Saint-Denis, a choisi de consacrer une partie de son catalogue à la production d'ouvrages populaires édités en créole réunionnais. Bandes dessinées, albums jeunesse ou romans sont publiés dans une liberté totale quant à la graphie adoptée. 'il s'agit d'une activité culturelle, l'édition de livres n'en est pas moins marchande et doit tenir compte de critères de rentabilité, du nombre minimal d'exemplaires à écouler... et des réticences de bon nombres de lecteurs à la lecture en créole. Résultat paradoxal s'il en est : les bandes dessinées "pays" sont publiées par Epsilon en français, alors que les franco-belges le sont en créole : c'est que dans chacun de ces deux cas, l'acte d'achat est de nature très différente... les chiffres de vente aussi ! Avec l'arrivée des nouveaux supports électroniques (i-phone) aux seuils de rentabilité d'une autre nature, l'édition en créole de BD locale devient possible. Quelles graphies pour quels ouvrages ? Chez Epsilon, il n'existe pas de système graphique unique, mais une graphie par contexte. Alors que pour les albums bilingues (français/créole), l'éditeur laisse à l'auteur l'entière liberté de sa graphie, il préfère que les BD franco-belges traduites en créole soient rédigées dans des graphies ouvertes, tenant compte des habitudes héritées de la pratique de la langue française. (...) D'autres systèmes sont parfois adoptés pour d'autres types d'ouvrages. Pour les textes longs (romans), si le narratif est en français et les dialogues peuvent figurer en créole, sans traduction dans le cas d'un créole éloigné du système de la langue créole, très proche du français. Ainsi, en l'absence de graphie officiellement reconnue par le monde de l'édition locale, l'éditeur a choisi de s'adapter au contexte lié à chaque publication. Son objectif est d'atteindre le plus grand nombre de lecteurs en fonction du type d'ouvrages et du public supposé. Ce souci d'une lisibilité maximale suppose sa part d'arbitraires et implique des compromis entre l'éditeur, l'auteur/traducteur et le lecteur.

Lambert-Félix Prudentest docteur en linguistique, professeur des Universités, membre du LCF et directeur du département de Créole à l'Université de La Réunion. Il est le président du jury du CAPES de créoles, rédacteur en chef de la revue internationale "Études créoles". Intitulé de son intervention : « La prise en compte des représentations de la variation dans l'élaboration d'une orthographe créole (Antilles, Guyane, Réunion) ».En milieux créoles, au moment de décider de la convention finale du tracé des lettres, la plupart des concepteurs d'orthographes se retrouvent devant la balance des usagers entre une volonté de représentation fidèle des sons prononcés et un ensemble de silhouettes graphiques héritées du français. Dans les propositions graphiques qui datent des décennies précédentes, le débat s'est instauré entre ce qu'on a appelé les pratiques "étymologisantes" qui font primer les habitudes graphiques venues du français, et les pratiques "phonétisantes" dominées par l'usage des lettres "rares" (k, w, z).
(...). Et dans ce que l'on a appelé en sociolinguistique un basilecte ou un acrolecte, un parler "kaf" ou un parler "yab", il y a une bonne part de positionnement affectif, psychologique ou idéologique, un "rapport" esthétique, sentimental et identitaire à la norme, qui conduit le locuteur à donner ou à refuser son adhésion au choix qu'il doit faire de telle nouvelle suites de graphèmes qui lui est plus ou moins habilement proposée. Sa communication est ainsi revenue sur cette dimension épilinguistique et sur le type de diplomatie et de pédagogie orthographiques à inventer au moment de retenir tel principe ou de proposer tel système. Pour "achever le travail" de conception graphique, il ne faut surtout pas négliger la dimension esthétique et instituante des lettres dans l'acte d'écriture et de lecture : il faut donc penser l'orthographe dans une compatibilité des autres systèmes de normes et de valeurs inhérents à la communauté. C'est aussi faute d'avoir ignoré ce champ-là que des tentatives précédentes ont échoué. Comme toutes les autres langues, les créoles varient dans l'espace, dans le temps et dans les "goûts" des locuteurs. Au moment du passage à l'écrit standard, un paramètre tentant d'intégrer y compris les sautes d'humeur des usagers doit être pris en compte.

Manuella Antoine est professeur de langue vivante régionale créole et de lettres, formateur à l'IUFM de la Martinique, auteur et traducteur en créole martiniquais, membre de l'association Sanblaj (promotion de la langue et de la culture créoles à l'école). Son intervention : "La graphie du créole martiniquais à l'épreuve des usagers : situations, perspectives". ès un bref rappel des systèmes graphiques utilisés en Martinique et Manuelle Antoine a procédé à une présentation de productions écrites individuelles en milieu scolaire et dans les médias, avec une mise en perspective des dysfonctionnements rencontrés et solutions envisageables.

Laurence Daleau, Professeur des écoles, maître formateur et itinérante LCR à La Réunion, co-auteur de "Oui au créole, oui au français" avec Yvette Duchemann, Axel Gauvin et Fabrice Georger a évoqué cette question : "Le créole à l'école de La Réunion : situations d'apprentissage et choix graphiques". Son écriture n'étant ni normée, ni standardisée, plusieurs solutions graphiques s'offrent à qui veut utiliser le créole réunionnais en classe. Cela pose des problèmes non seulement aux enseignants, mais aussi aux formateurs, aux parents, et bien entendu aux élèves. Aujourd'hui, différents dispositifs permettent en classe d'utiliser l'écrit du créole. Ces dispositifs correspondent à des situations d'apprentissage différentes avec des objectifs différents. Elle a souligné les caractéristiques que devrait posséder la graphie la mieux adaptée à chacune des situations d'apprentissage. Puis elle a esquissé une synthèse de ces caractéristiques qui pourrait permettre de tendre vers une graphie satisfaisant autant que faire se peut aux différents besoins de l'enseignement.

Carpanin Marimoutou est Professeur des Universités à l'Université de La Réunion, membre du LCF. Il a porté son intervention sur "Possibilité de jeu sur les rapports signifiant/signifié dans la création littéraire en créole". Pour lui, les écrivains ne se soucient pas de la graphie, mais ils écrivent et c'est cela qui est important : c'est de produire. S'il ne soucient-ils pas de la graphie, c'est parce que la littérature est ce qui permet un jeu à la fois des signifiants et des signifiés. L'écrivain joue pour produire du sens. De plus, la littérature créole, même si elle comporte des romans, est surtout constituée de poèmes ou de sirandanes : ces textes courts exigent moins que le roman une norme, puisque c'est le domaine du jeu de langue par excellence. Donc, s'il y a plusieurs systèmes graphiques, l'écrivain va en jouer, pour produire des effets intéressants, et s'il y a une seule graphie, de toutes façons, il essaiera de procéder à des glissements de son et des mises en résonance.

Charles Tijus est professeur de psychologie cognitive à l'Université Paris VIII. Son intervention : "Interactions et interférences dans les apprentissages". expliquait que la catégorisation est probablement le mécanisme central de la cognition sur lequel se basent les apprentissages. Il a montré comment le modèle de catégorisation contextuelle basé sur le treillis de Galois rend compte des trois modes d'apprentissage que sont l'incrémentation (accrétion ou l'accroissement) de connaissances dans les structures catégorielles existantes, la restructuration du réseau de catégories et la spécification des connaissances qui s'accompagne d'automatisation avec le réglage des performances aux situations courantes. L'intérêt du modèle est de représenter dans un même formalisme le savoir et le savoir-faire relatifs aux trois modes d'apprentissage, dont ceux qui sont relatifs à l'insight. Le fonctionnement du modèle a été présenté, accompagné de données sur la boucle perception/action et le problème du désengagement du mode automatique lorsque la situation connue interfère avec le but, de données sur l'effet de la position de la question sur la compréhension de texte lorsque le but donné par la question interfère avec la situation à comprendre. Enfin, il a évoqué la question de l'intérêt de faire appel aux catégories connues en L1 pour faciliter la compréhension (les travaux de l'équipe de D. Legros) tout en favorisant le réglage des performances et l'automatisation (le tuning) en L2.

Denis Legrosest un spécialiste de la compréhension de texte et travaille depuis plusieurs année sur l'effet de la culture de l'apprenant. Son intervention : « Itérations de l'information dans la compréhension de texte ». cours de la lecture d'un texte, le lecteur progresse dans la construction d'une représentation mentale de ce qui est décrit par le texte. (...) Il a exposé les facteurs qui influencent la capacité du lecteur à lier des mots entre eux (construction de la cohérence locale) ou des phrases entre elles (construction de la cohérence globale). (...) Sa communication a ainsi eu pour objectif de mettre en avant l'idée selon laquelle l'activité de compréhension ne repose pas sur le seul principe de l'économie mentale, mais qu'elle dépend de la ré-itération d'informations (lexicale, grammatique, syntaxique, sémantique) tout à long du texte. Il nous semble que ces éléments peuvent être pertinents pour éclairer les choix concernant le système orthographique pour le créole de La Réunion.

 

"Faites don de vos SMS à la science"

Gudrun Ledegen est docteur en sciences du langage et maître de conférence à l'Université de La Réunion et chercheure au CNRS. Elle est directrice du Département de Lettres Modernes. Son intervention s'intitulait : "L'écrit-SMS en créole réunionnais : description linguistique et lumières sociolinguistiques". L'analyse graphique des 20.000 SMS récoltés lors de l'opération "Faites don de vos SMS à la science" qui a eu lieu d'avril à juin 2008 a jeté une lumière sur les pratiques graphiques ordinaires en créole réunionnais. En effet, la comparaison avec les graphies du français, à La Réunion et en Belgique francophone - car le projet sms4science a été initié par le Laboratoire Central de l'Université de Louvain-la-Neuve, pratiqués dans cet écrit-sms - permet de décrire linguistiquement les graphies majoritairement utilisées : basilectales ou acrolectales ? Se présentent-elles par regroupement ou de façon mixte ? Y a-t-il des graphies constantes ?... L'intervenant a également abordé le rôle de l'écriture SMS dans la modification sociolinguistique récente devant la graphie phonologique.



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28 avril 2009 2 28 /04 /avril /2009 08:28

'garde trois zieu = regarder attentivement

50 malbars su un manche pioche = beaucoup de gens occupés à ne rien faire

aller voir madame Paul = aller aux toilettes

bouche ton gueule = ferme-la

donne dame-jeanne pou bouteill = marché de dupes

en z'arête poisson= très maigre, squelettique

faille faille la rouille = très fatigué

faire Pâques avant Carême = avoir des relations sexuelles avant le mariage

faire son pti l'auto = prendre ses jambes à son cou

faire son zourite = se cacher, se dissimuler ; filer en zourite = disparaître à toute vitesse

fait tire le vent = faire faire son rot à un baba

fam mange le corde = femme aux moeurs légères

figur pareil le po jaque = avoir de l'acné

gagne salarié = être à la retraite

garçon le prêtre = enfant de choeur

gardien volcan = personne rousse

gâteau soleil = excrément

gencive goyave = rouge et proéminente

gonfler en mâle dinde = se donner de l'importance

gosier i batt quat' cylind = avoir un gros appétit ; grand gosier = personne qui boit beaucoup

gratteur ti boi = sorcier

grouille out cu = dépêche-toi

l'entrée d'tab' = le hors d'oeuvre

l'hôtel zaricots = la prison

la grain d'bibasse dans zorey = être sourd

le diab i marie son fille = l'arc-en-ciel

lèv saucisses = bouche lippue

lu la gagn un paquet de brèdes = annonce de la naissance d'un garçon

lu la mangé gingemb = excité sexuellement

lu la regarde soleil dan passoire = il/elle a des taches de rousseur

lu veut traverse la mer su un coque pistache = se dit d'un projet impossible à réaliser

lu voit un mort qui passe, lu veut deux = personne jamais contente

magasin suif = l'anus

Marie bon coeur (inutile de traduire)

na pu l'huile dans le lamp = la vieillesse rend impuissant

perd' son rondelle = pour une fille, perdre son pucelage

pèse su la queue pou voir si le têt i bouge = sonder, essayer de tirer les vers du nez

pique la tête volaille = contracter une maladie vénérienne

piqure pou boire = ampoule buvable

pluche z'oignons = poireauter

quitte gendarmes pou rent police = blanc bonnet bonnet blanc

quitte Grand Bénare pou aller su Piton d'neiges = tomber de Charybde en Scylla

ramasse mangue a terre = se dit d'un homme ayant recueilli une femme un peu libre sous son toit

rond comm le boule carrée = ivre

royaume vent' en l'air = le cimetière

sent l'odeur d'bois sap' = sentir le cercueil, être près de sa fin

serviette le mois = serviette périodique

sirop z'anana = correction, râclée

son gaz i monte = il devient fou

son zyeu i 'clatent comm zétoil 4h = ses yeux brillent comme l'étoile du berger

un zyeu i vole manioc, l'aut i veille gardien = avoir du strabisme

zenfan dan zerb = enfant illégitime

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23 avril 2009 4 23 /04 /avril /2009 18:09

 

accordéon la bouche = harmonica

allumer = aguicher ; ti fill la i allume mé i étin pa

amusoir = sexe de l'homme

anciennement = autrefois

anin = frère aîné ; aka = soeur aînée

argent braguette = les allocations familiales

assise = s'asseoir ; assise a zot ! = asseyez-vous

avale maïs en grains = avoir des relations sexuelles (pour une femme)

avaleuse l'hostie = grenouille de bénitier

avoir cassé l'armoire = être bien habillé

baguettes jazz = jambes maigres

baise un patt cochon = poser un lapin

bas = chaussettes

bâtard = métis

batt la main = applaudir

batt su son lestoma = se réjouir

bifteck terre-neuve = morue

boug la lé com carapate dans fess tortu = il est collant

caf bleu = très noir

caf na set po = très résistant, on peut l'employer à tout

caloubadia dan tente couverte = marché noir

cancrela la march avec béquilles dan soutien-gorge son momon = quelqu'un de très laid

cass ti boi = dire du mal de quelqu'un

causeman la bouch i pu = paroles injurieuses

chapo plastique =préservatif

chavire le grain d'papaye = atteindre le 7è ciel

dehors = importé

dent la chaux = dent décalcifiée, friable

dentel = frimeur ; boug la lé un dentel

déporté = exilé

devineur = sorcier, devin

dix = disque

docteur marron = guérisseur

dominos lestoma = muscles abdominaux

donneur d'cul = traître, vendu

dor su cric = pour un homme, s'endormir en érection sans que le désir ait été assouvi

dragées cabri = crottes des chèvres

encens = baie rose

faire domino = le jeu de l'amour à deux couleurs, un noi avec une blanche, un blanc avec une noi

faire l'entracte = faire des manières, faire traîner les choses

gagne la couleur = être né blanc

mett out cuiller sale dan cari lé zot = se mêler des affaires des autres

moin lé creu = j'ai envie de faire l'amour

mon blanc = monsieur

na 2 coeurs = il hésite

passer la douane = avoir des douleurs anales après avoir absorbé des plats pimentés

s'emmancher = se mettre avec quelqu'un

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25 janvier 2009 7 25 /01 /janvier /2009 13:54

On m'a dit en métropole au début du mois que le créole envahit mes mails et qu'on comprend de moins en moins ce que j'écris. Les quelques mots de créole que j'avais donnés dans le billet du 24 août sont donc devenus très insuffisants. Pour remédier à la situation, je vous offre un petit lexique, incomplet certes mais c'est mieux que rien. Pour les noms, il faut savoir qu'il n'y a pas de genre. C'est toujours un ou le.  

babafig = fleur de bananier

babouk = araignée

batay-kok = combat de coqs

bébèt bondié = coccinelle

bébèt larzan = scarabée

béko = bisou

bertel = hotte plate en vacoa tressé

bonbon la fès = suppositoire

bougg = homme

bourik = âne

bred = feuilles diverses (chouchou, cresson, cœurs de citrouille, pariétaire, morelle, lastron, chou de chine, songe)

brinzhel = aubergine

daborin = premièrement

dada = grand frère

dalon = copain

danfon laba = très loin

dantel-lakaz = lambrequin

dodo = bière de la Réunion

ek = avec

fanm-toussël = mère célibataire

farfar = grenier

fer dantel = frimer

ferblan = bidon

flèr soley = tournesol

fouké = puffin

fourmi gran galo = fourmi à longues pattes

gardien dlo = libellule

gato patat = gâteau à base de patates douces

gouté = petit-déjeuner

gramoun = personne âgée

gran koudvan = cyclone

GSM = téléphone portable

kabri = chèvre

kanbar = igname

kapïshon = imperméable

karo = fer à repasser

koté soulié = chaussure

koté zië = œil

kotonmili = coriandre

koudsek = petit verre de rhum

kouvertur péi = fille pour la nuit

kozman = paroles

kroizé-shëmin = carrefour

labriz-lamer = vent diurne

labriz-later = vent nocturne

landormi = caméléon

lëgrin = lentilles/haricots secs/pois

lontan = autrefois

mâl kabri = bouc

marmay = garçonnet ou fillette

marmay-koméla = la jeunesse actuelle

massalé = mélange de coriandre, cumin, girofle, piment, poivre

modiss = couturière

mon gaté = mon kaf = mon noi = ma chérie, mon chéri

mous a mièl = abeille

nafer = affaire

nassion = ethnie

palto = veste

panié-salad = voiture de police

papié kabiné = papier de toilette

pié fig = bananier

pié filao = filaos

pié salad = laitue

piedboi = arbre

piédri = bon parti, fonctionnaire qui subvient aux besoins de son conjoint

pilon = mortier

poud-savon = lessive

rékin = prostituée

roké = bonchien

roulèr = tambour

safran = curcuma

sanpié = scolopendre

sapèl malbar = temple tamoul

savat doidpié = tongues

shatmaon = renard

shatt = moumoute

shoushout = sexe de la femme

sokolatine = pain au chocolat

somin' nfèr = roulé à la confiture

tanp sinoi = temple bouddhiste

tantine larou = fille qui drague les hommes possédant une voiture

tas kodind = tâches de rousseur

ti gaté = câlin

ti poul = poussin

tisuis = fromage frais

vitman = rapidement

zamal = pantagruélion

zano = boucles d'oreilles

zëyë malbar = œillet d'Inde

zhako = singe

zhet son kor = se suicider

zorey = français de métropole

zourit = poulpe


davantage de vocabulaire : le petit réunionnais


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6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 11:41

PARLEZ FRANCAIS


Ti créole

Dès qu ti rent' l'école

Premié zaffaire y dit à toué :

Parlez Français.

          Ec ton papa, ec ton moman

          Créole ton sèle causement !

          Ec marmaille comme toué

          Quand zot y zoué

          Ec ton patois

          Toué cé lo roi.

Voilà zordi y dit à toué :

Parlez Français !

Ti créole

Toué lé pris dans la colle.

          Toué lé pas bitié, ton bouce y moque

          Ton front y frise

          Ton zié y plisse

          La pas loin ti deviens toc-toc

          Encore un pé

          Toué pou pléré

Lo Maît' la commandé

Parlez Français

Ti créole

Toué le pris dans la colle

          Ti comprends pas quoça li vé

          Alors ton bouce y res' fermé

          Ton zié y commence voilé

          Ti fouille patate dans ton nez

           Lo maît' y grogne

          Tention li cogne

Laisse pas ti créole

Dans la colle

Laisse à li dit son dé mots

Li s'ra pas Victor Higo

Et pi après ?

Li s'ra Rénioné !


Ti Flère la Misère, 1980

Daniel Honoré

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23 septembre 2008 2 23 /09 /septembre /2008 08:49

Surprise hier en lisant le Journal de l'île : après-demain, sort _La Kaz Razade_, version créole rényoné de Astérix chez Rahazade ! Pas sûr que la traduction vaille celle de l'équipe d'Axel Gauvin sur les 2 Tintins qui sortiront fin octobre mais attendons d'avoir lu avant de juger. Les lycéens rényonés liront-ils Madame Bovary en BD créole un jour ?

http://www.temoignages.re/article.php3?id_article=32552

Vous êtes le traducteur choisi par Caraïbéditions pour la traduction de "Astérix chez Rahazade" en créole de La Réunion, le créole rényoné . Quel est votre parcours personnel, et d’où vient ce goût pour la traduction ?
François Saint Omer : Le goût pour la traduction m’est venu tôt. Je pense avoir commencé à le faire de façon naturelle dès l’enfance, période durant laquelle j’entends à la fois le français, langue de l’enseignement notamment, et le créole réunionnais, langue que parle ma maman. C’est le début naturel pour tout natif créole, pourrait-on dire, mais je décide en grandissant de m’y consacrer plus formellement en faisant de la langue l’objet de mes études supérieures.
Grâce à mes études et mes expériences terrain, j’ai peu à peu accumulé une expérience de terrain au travers de plusieurs approches de la traduction franco-créole et inversement.

Vous n’êtes malgré tout pas le seul linguiste en mesure de faire cette traduction d’Astérix en créole réunionnais, comment vous êtes vous greffé sur ce projet ?
Presque par hasard, même si le hasard ne vient pas tout seul. J’ai été contacté par une amie, webmaster d’un site consacré au CAPES en créole dans la zone Caraïbe, Francesca Palli. Elle avait une nouvelle à m’apprendre : elle m’avait spontanément proposé, après avoir été jointe par l’éditeur Caraïbéditions, pour devenir le traducteur d’une version en créole réunionnais d’Astérix ! J’ai été très enthousiaste, d’autant que se présentait là une opportunité à saisir pour moi, mais aussi pour la langue de la Réunion. Elle m’a parlé de cette jeune maison d’édition et de leur première parution aboutie d’un album d’Astérix en créole antillais. M. Charbonnier, l’éditeur, m’a joint par la suite ; plusieurs postulants étaient pressentis pour effectuer cette traduction et un comité allait se réunir pour statuer sur ces candidatures. 15 jours plus tard, il m’a recontacté : j’avais été choisii ! J’étais très content de pouvoir dès lors donner mon accord et me lancer sur ce projet.

Astérix est la BD la plus lue en France et notamment à La Réunion. Traduire une telle BD n’a pas dû être chose facile...
Oui, ça été un travail difficile, surtout par rapport à tout ce qu’Astérix véhicule au niveau inconscient du langage. Il fallait faire une traduction, mais surtout une adaptation par rapport à notre contexte local.
Pour le personnage d’Astérix, c’était aisé : il m’a tout de suite fait penser à Ti Jean, un petit garçon espiègle et débrouillard, une figure d’un de nos contes traditionnels.
Si certains noms de personnages, tels qu’Astérix ou Obélix, devaient rester identiques à la version originale, d’autres, en revanche pouvaient être "créolisés", exemple du barde Assurancetourix. J’ai donc décidé à un moment donné de discrètement récolter des avis dans mon entourage, sans parler de ce projet de traduction en cours à mes interlocuteurs.
La plus grande erreur à ne pas commettre lorsqu’on traduit une oeuvre comme celle d’Uderzo et de Goscinny, c’est de faire une traduction littérale, "mot à mot" des expressions et des jeux de mots qui se glissent dans les bulles. Une telle traduction n’a aucune saveur, et ne se raccorde en rien au vocabulaire et aux expressions locales. J’ai tenté de ne pas choisir des solutions de facilité, pour le coup.
Mais conserver l’esprit et l’humour d’Uderzo, en garder tout le sel, ça n’a pas été facile ! Pour transformer le texte et que cela reste, on doit naviguer sur le fil du rasoir !

Conserver l’esprit, s’approprier cet humour et le créoliser aura été la grande difficulté, mais avez vous pris plaisir à faire cette traduction ?

Oh oui, on prend beaucoup de plaisir ! Il y a des moments formidables, il y a l’humour, et la langue, la langue d’Uderzo. Une langue ni trop littéraire, loin de textes plus consensuels rempli d’images et de jeux de mots fabuleux. Je me suis remis en question en effectuant ce travail délicat, je dois dire que ça restera une expérience vraiment formidable pour moi en tant que traducteur en tout cas.

Avez-vous fait usage d’outils pour travailler ou faites vous plus confiance à votre instinct et votre expérience ?
Comme à présent, beaucoup d’outils ont le mérite d’exister, je travaille toujours avec plusieurs dictionnaires créoles français lorsque je fais une traduction. Lorsque je "butais" sur un mot, je les consultais et je réfléchissais beaucoup. Je souhaitais coller à la réalité de notre langue sans trahir ni l’auteur ni les lecteurs.
Je cherchais surtout à éviter à la fois des mots trop francisés, et aussi éviter d’avoir à créer des mots ; parce que je suis un créateur de mots manquants en réunionnais.
Je voulais que les lecteurs puissent comprendre tout le vocabulaire de cet Astérix et s’y retrouvent ; en tout, sur cet album, je n’ai finalement dû créer que deux mots sur l’ensemble du texte. Les autres mots sont des mots usuels et actuels, parlés par les Réunionnais dans le langage courant, celui de tous les jours, le créole de la rue, sans être du créole "SMS" bien évidemment.

Quelle graphie avez-vous utilisée ?
En lisant la BD dont la traduction en créole réunionnais a été rédigée dans la graphie 83, les puristes pourraient être surpris par quelques libertés que nous avons prises avec cette graphie. Qu’ils comprennent que c’est le souci de respecter l’identité du héros Astérix qui est à l’origine de l’usage du "x", inexistant dans la graphie.
C’est aussi la spécificité du genre qui a guidé les autres choix : dans le souci d’user de tous les artifices graphiques nécessaires à un intérêt soutenu, pour rendre par exemple le caractère affecté et précieux des propos du personnage de Sèrane ; pour ne pas trop décevoir le lecteur friand de formules latines émaillant le texte original, tout en restant cohérent avec les règles de la graphie. C’est ainsi que « contraria contrariis curantur » a été écrit « kontraria kontrariis kurantur ». Au final, l’exercice nous aura amenés à aborder, dans la pratique, une réflexion enrichissante dont nous espérons faire profiter le lecteur.

A qui est destiné cet ouvrage ?
A tout public, bien entendu ! Il peut être acheté et lu par des créolophones confirmés ou des créolophones "en herbe", notamment grâce à la présence d’un lexique créole-français en fin d’ouvrage. Cet album sera diffusé et distribué sur La Réunion, mais également dans toute la zone Océan Indien et en métropole auprès de nos compatriotes réunionnais.


La genèse du projet

A ce jour, les nombreux voyages d’Astérix n’ont jamais conduit notre héros jusqu’aux lointains rivages de La Réunion. Ceci n’a cependant pas empêché l’écho des exploits de cet irréductible gaulois et de ses fidèles compagnons de route, de traverser les mers et les océans pour arriver jusqu’à nous.
Depuis presque cinquante ans, grâce à Albert Uderzo et René Gosciny, les Réunionnais ont pu suivre les exploits de leur personnage de BD préféré. Aujourd’hui, le temps est venu... si Astérix ne vient pas aux Créoles c’est le créole qui ira à Astérix... Le succès de la première publication d’Astérix en créole des Antilles, en début d’année a convaincu l’équipe de Caraïbéditions de la nécessité de lancer Astérix en créole de La Réunion. Notre héros national s’est déjà prêté, à sept reprises, à la pratique des "langues de France" (nom de baptême des langues régionales de France donné par le Ministère de la Culture).
Après le créole des Antilles, le créole de la Réunion devient officiellement la 107ème langue et dialecte du monde parlée par Astérix et ses compagnons d’aventure. Cet ouvrage a été traduit par François Saint Omer. Roger Theodora, le correspondant de Caraïbéditions à La Réunion a également apporté sa précieuse collaboration à la publication de cet album.
Les réunionnais, de souche et de coeur, vont pouvoir prendre plaisir à découvrir, en créole, toutes ces expressions célèbres tombées dans le langage courant et parfois devenues proverbe, telles qu’ « ils sont fous ces romains », « le ciel va nous tomber sur la tête », « par Toutatis »... en espérant qu’elles deviennent elles aussi un jour une référence à La Réunion.
Les créolophones débutants vont également pouvoir découvrir cet album grâce à un lexique créole/français d’une centaine de mots.


Présentation de Caraïbétidions

Caraïbéditions est une jeune Maison d’édition qui souhaite ouvrir un nouvel espace d’expression créole et plus largement "Domien".
Après la publication, début 2008, du premier Astérix en créole des Antilles, "GRAN KANNAL LA", du premier Titeuf en créole des Antilles, "CHIMEN LAVI" et du premier Astérix en créole de La Réunion, "LA KAZ RAZADE", Caraïbéditions prévoit de publier de nouvelles BD en créole ainsi que des ouvrages en français, destinés à tout public, mêlant le texte, le dessin et la photo sous toutes ses formes : BD, livres jeunesse illustrés, romans, essais...
Pour cela, elle souhaite mettre en avant des talents issus des Départements d’Outre Mer, débutants ou confirmés et permettre à des auteurs étrangers reconnus de travailler sur des projets ayant pour thème les Antilles-Guyane, La Réunion et ses habitants.
Elle souhaite également publier des oeuvres françaises ou étrangères en créole.
Le lectorat de Caraïbéditions est tant à l’intérieur des frontières des Antilles et de La Réunion, qu’à l’extérieur de celles-ci. Cependant, à travers sa diffusion, Caraïbéditions tente, avant tout, de toucher les lecteurs antillo-guyanais et réunionnais, de souche ou de coeur, basés dans les départements d’Outre-Mer, en métropole ou dans le reste du monde
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16 septembre 2008 2 16 /09 /septembre /2008 15:11

En écrivant ici vendredi dernier que dans deux mois paraitra un album d'Astérix en créole des Antilles et que la version en créole réunionnais semble inévitable, je ne me trompais pas ou presque pas. Le même jour, dans le Quotidien de la Réunion, une page entière était consacrée à la parution prochaine de deux albums de Tintin en créole réunionnais.

http://www.objectiftintin.com/whatsnew_tintin_4653.lasso

Les deux premiers volumes qui sortiront dans deux mois sont "Tintin péi Tibet" et "Le kofré bizou la Kastafiore". Et ensuite sortiront deux titres par an.

Le titre de cette page du Quotidien, c'est Tintin, Milou et le Kapitène Sounouk. Le snook ou sounouk, c'est du poisson séché importé des pays scandinaves (hareng, haddock) et l'on sait que c'est ce poisson qui a sauvé de la famine des millions d'habitants de ces pays aux XVIIIè et XIXè siècles. Mon grand-père en vendait enfant dans le port d'Esbjerg pour cette raison. Les réunionnais font un excellent snook rougail. [le rougail, c'est une sauce pimentée, soit avec du curcuma pilé au mortier, soit cuit à la marmite. Ingrédients : petits piments verts, gros sel, combava, oignon, tomate].

Certains souriront peut-être devant une traduction de Tintin en créole en se souvenant de _Tintin_au_Congo_, le 2è album d'Hergé paru en 1931. Plus raciste et colonialiste, tu meurs. Cet album ne sera jamais traduit. Mais l'intéressant n'est pas là. Il y a un mois, je me disais « il faut que tu apprennes vite le créole pour faire honneur aux réunionnais qui vivent ici depuis 3 siècles en leur parlant dans leur langue ». Une amie, Evelyne, m'a expliqué que je devais en effet découvrir la langue et la culture créoles mais non pas m'adresser aux élèves dans cette langue : ils pourraient croire que je cherche à les moucater ou que je m'infiltre dans leur monde de façon indiscrète.

C'est pourquoi j'ai l'impression que le nom d'Hergé sert ici de signe de reconnaissance du créole comme langue noble. J'ai compris, grâce à mes amis d'ici et mes collègues, que l'un des pilotes de la traduction, Axel Gauvin, est un grand grand écrivain réunionnais actuel et que l'opération est bien d'abord culturelle et non pas une manoeuvre commerciale. « La principale difficulté a été de faire passer l'imagerie et les métaphores du créole en restant toujours dans le même niveau de langue ». Autre difficulté, le traitement des jeux de mots « notamment lorsque la castafiore écorche sans arrêt le nom du capitaine Haddock ».

Comment traduire la prose délicate du capitaine Haddock euh du kapitène Sounouk ?

Foutor mizér d'in sor ! Mil million d'papang (rapace sorte de hérisson j'ai confondu avec tangue, merci Euphrasie) rapiang !

Zoboulmouk ! Vanpir ! Guèl de rak ! Grotète ! Sitarane ! Zerbabouk ! Kordon morèsse ! Chikoungounia ! Grandiab ! Rakér d'bivete ! Tète Margoz Kordon morèsse ! Kataplasse !


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24 août 2008 7 24 /08 /août /2008 06:48
coman i lé !
je sais que le créole réunionnais est très différent de l'antillais mais très proche des créoles de Maurice (île anglophone) et de Rodrigues, mais à Mayotte ?
ici, un homme, c'est "un boug"
on ne dit pas "oui" mais "ben"
un "baba" c'est un bébé
une tantine c'est une fille
une couverture péi, c'est une fille pour la nuit
un zoreill c'est moi (blanc métro)
lébel = c'est bien
lémol = c'est nul
un marmaille = un gamin
moucater = se moquer
nénenne = nounou (nourrice)
case = maison
quand l'animateur de Freedom a demandé en direct à Ines (ma proprio) : "avait-il laissé les clés sur la voitu ?" elle a répondu "les clés il léza gardées pou l'ouvwi"
@+
JC
hier vous aviez le couchant depuis Saint Louis, là je vous mets les vagues près de Piton Saint-Leu 

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