25 novembre 2008
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LES TRAVAILLEURS
Mais entends-tu la cloche aux lointaines volées ?
Sous la main du planteur elle annonce le jour.
Sa voix lente, roulant dans le creux des vallées,
Remonte, appelant l'homme aux travaux du labour.
Les Noirs, à son appel, quittent les toits de chaume,
Secouant à leur front un reste de sommeil.
Le firmament sourit et la savane embaume;
Mais pour l'esclave est-il des fleurs et du soleil ?
Ils viennent, on les compte, et le Maître gourmande;
La glèbe aride attend leurs fécondes sueurs.
Ils s'éloignent, suivis du Chef qui les commande,
Et la plaine a reçu l'essaim des travailleurs.
Vois-tu ce Commandeur, hélas! comme eux esclave,
Du fouet armé, debout sous l'arbre du chemin ?
Un chien est à ses pieds; lui, sur un bloc de lave,
Il surveille pensif son noir bétail humain.
Le fer creuse et gémit; la bande aux bras d'athlètes
Fouille le sol brûlant sous l'astre ardent et clair;
Parmi les blonds roseaux luisent les noires têtes;
L'oiseau libre et joyeux passe en chantant dans l'air !
O dure servitude ! ô sort! ô lois cruelles !
Au joug de l'homme ainsi l'homme se voit plier !
Ah! loin de ces tableaux navrants ouvrons nos ailes !
Fuyons, doux bengali ! fuyons pour oublier !
Poèmes et paysages 1852
Auguste Lacaussade
un sang d'encre